« La première fois que j’ai vu une femme j’avais onze ans et je me suis trouvé soudainement si désarmé que j’ai fondu en larmes. Je vivais dans un désert habité uniquement par cinq hommes. Mon père avait donné un nom à ce coin perdu: Jesusalèm. C’était cette terre-là où Jésus devrait se décrucifier. Et point, final.
Mon vieux, Silvestre Vitalicio, nous avait expliqué que c’en était fini du monde et que nous étions les derniers survivants. Après l’horizon ne figuraient plus que les territoires sans vie qu’il appelait vaguement l’Autre-Côté. »
Dans la réserve de chasse isolée, au cœur d’un Mozambique dévasté par les guerres, le monde de Mwanito, l’accordeur de silences, né pour se taire, va voler en éclats avec l’arrivée d’une femme inconnue qui mettra Silvestre, le maître de ce monde désolé, en face de sa culpabilité.
Mia Couto, admirateur du Brésilien Guimares Rosa, tire de la langue du Mozambique, belle, tragique, drôle, énigmatique, tout son pouvoir de création d’un univers littéraire plein d’invention, de poésie et d’ironie.
Trois grands livres forment la charpente du roman. Dans la première partie, Mwanito, le narrateur, présente ce qui fait son monde. A 11 ans, il vit dans un désert habité uniquement par cinq hommes. Son humanité n’est composée que de son père Silvestre, son frère Ntunzi, Zacaria, le militaire et son oncle Aproximado qui leur rend visite de temps en temps. Mwanito présente chaque membre de son humanité dans les premiers chapitres. Au début, on rit de l’étrangeté du père qui vit replié sur lui-même, oublieux de son passé puis on est assez choqué de son extravagance et de l’affection qu’il accorde à son ânesse.
J’ai ressenti de la lassitude due à la lenteur du rythme jusqu’à l’apparition de Marta. La venue de cette femme portugaise va provoquer des remous dans la vie des habitants du désert. A travers elle, c’est la thématique de la condition féminine qui est introduite.
La profondeur de l’histoire s’accentue au fil des pages, les révélations au dernier livre éclaircissent les raisons de la solitude de Silvestre.
L’accordeur de silences, c’est un style très imagé, philosophique. La saudade, omniprésente dans le roman, donne une atmosphère particulière au texte. J’ai apprécié les thèmes abordés: poids du passé, culpabilité, relation père-fils, relation homme-femme, expression de la féminité, solitude.

Ce roman a été choisi par Sarah, ma fidèle libraire dans l’aventure Kube. Dans ma commande Kube de décembre dernier, je lui ai indiqué que je remplissais ma carte des auteurs africains et aimerais bien lire un auteur de l’une des nationalités suivantes: centrafricain, namibien, tanzanien, mozambicain ou érythréen.
Dans cette Kube, j’ai également reçu un marque-page Kube, deux sachets de thé de la route des comptoirs, un extrait de Le sixième sens de L.P.Hartley paru en janvier dernier aux éditions La Table Ronde, un calendrier 2021 et des fiches de lecture bristol de la marque foglietto.

Et je remercie l’équipe Kube pour leur diligence car je ne m’attendais pas à recevoir la Kube fin décembre. Ca m’a fait du bien de l’avoir pour mon anniversaire 🙂
Je trouve cet article émouvant à la fois ï instructif. Merci bien !
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Aww merci Aboubakar, je suis touchée 🙂
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