Publié dans Arrêt sur une oeuvre

La société des rêveurs involontaires de José Eduardo Agualusa

Le journaliste Daniel Benchimol rêve de gens qu’il ne connaît pas mais reconnaît dans la mémoire de l’appareil photo qu’il retrouve sur une plage d’Angola. Moira Fernandes, une artiste mozambicaine habitant Le Cap, met en scène et photographie ses rêves. Hélio de Castro, un neuroscientifique, les filme. Hossi Kaley, le patron de l’hôtel Arco-Iris, ancien guérillero au passé obscur et violent, se promène dans les rêves des autres vêtu d’un costume violet, ce qui va donner à un service secret l’idée de l’utiliser pour manipuler les rêves de la population lors des élections, mais ne l’empêchera pas malgré tout de connaître un grand amour.

Les rêves rassemblent ces quatre personnages dans un pays totalitaire au bord de la destruction, où se réveillent aussi les rêves de liberté de la jeunesse.

Écrite dans un style éblouissant, cette Société des rêveurs involontaires est une histoire d’amour, un récit fantastique, un polar onirique et une vraie satire politique pleine d’humour, qui questionne la nature de la réalité tout en réhabilitant le rêve comme instrument de transformation du monde.

José Eduardo Agualusa est le 2eme auteur angolais que je lis. Le point d’entrée de ce roman est le rêve. L’onirisme a une part importante dans le récit.

Daniel, jounaliste, rêve de gens qu’il ne connaît pas mais reconnaît dans la mémoire de l’appareil photo qu’il retrouve sur une plage d’Angola.

Hossi Kaley, ancien guérillero au passé obscur et violent, se promène dans les rêves des autres vêtu d’un costume violet.

Moira Fernandes, une artiste mozambicaine met en scène et photographie ses rêves et Hélio, un neuroscientifique mène une expérience scientifique sur le rêve.

Le rêve est décrit comme un moyen d’entrer en contact avec l’autre. J’étais au début très emballée par le volet orinique du roman mais le développement de ce volet ne m’a pas convaincue. Ou peut-être suis-je passée à côté de ce que l’auteur voulait traduire.

Ce roman de 252 pages est déroutant, il demande de la concentration. Au début, je me suis emmêlée les pinceaux avec Daniel, le narrateur principal et Hossi, narrateur occasionnel. 

Je méconnais l’histoire de l’Angola et il m’a fallu quelques recherches pour savoir à quoi faisait référence l’UNITA par exemple. J’ai apprécié la partie « révolution » de l’intrigue qui met en avant de jeunes femmes et hommes. Des rêveurs de liberté mais pas que. Ils veulent aller au-delà du rêve, ils veulent que la liberté se matérialise dans leur pays. Ils la revendiquent au prix de leurs vies.

Ce roman est truffé de passages qui font réfléchir. Si les personnages sont bien construits, je n’ai malheureusement pas réussi à m’attacher à eux.

«ne vous faites pas d’illusion, mon cher Armando. Ce peuple qui proteste contre moi ne tardera pas à m’applaudir. Le peuple est inconstant, stupide et sans mémoire.»

Ce passage m’a fait penser à tous ces humains qui sont plus sensibles à la souffrance des animaux qu’à celle des humains…

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Les transparents – Ondjaki

Les Transparents (Points) (French Edition): Ondjaki, Danielle ...

Je remplis lentement mais sûrement ma carte d’auteurs africains. A la recherche d’auteurs angolais, je suis tombée sur ce roman d’Ondjaki. Convaincue par la 4e de couverture, je l’ai inséré dans ma wishlist et obtenu dans le swap sur les merveilles.

 

Le récit s’ouvre sur un incendie. Un aveugle demande à son compagnon qui est un marchand de coquillages la couleur de ce feu qui monte du sol vers le ciel de Luanda.

Trois autres personnages sont également confrontés à cette gigantesque danse de jaunes qui se propage dans le ciel. L’homme s’appelle Odonato, sa femme Xilisbaba, son amie MariaComForça. 

 

Sans aucune indication temporelle, on se retrouve dans l’Immeuble qui avait sept étages et respirait comme un être vivant. Au 1er étage, une source d’eau douce, causée sans doute par une fuite intarissable, coule en abondance.

Au 4e étage, il y a Edù qui marche avec difficulté à cause d’une hernie gigantesque

Au 5e, vit le CamaradeMuet, complaisant et silencieux

Au 6e vivent Odonato et sa famille. Il a la nostalgie du Luanda d’autrefois, il a cessé de manger pour laisser la nourriture à ses enfants et est en train de devenir transparent. Son fils aîné survit grâce à des vols.

Il y a MariaComForça, qui vend du  poisson grillé, et son mari, Joaodevagar, le débrouillard, qui cherche à gagner de l’argent par tous les moyens possibles.

Et Paizinho, le jeune garçon qui cherche à la télévision sa mère dont il a été séparé à cause de la guerre.

L’Immeuble abrite aussi des journalistes, des chercheurs. Tout ce beau monde se croise, échange sur son quotidien, ses peines, ses espoirs, les cicatrices sociales laissées par la guerre. 

Des hommes, des femmes qui se réfugient dans l’Etre invisible parce qu’ils n’ont aucun recours dans le monde visible. 

–  Comment est-ce que vous tuez les microbes ?

–  en priant

– comment ?

– je prie, je demande à dieu qu’il les tue. ça ne sert à rien de faire bouillir l’eau, j’ai vu ça à la télé, nos microbes d’ici, ils aiment l’eau bouillante, l’eau de javel aussi, qui tue plus d’enfants que de microbes alors je prie

 

Une foi dont se servent les rapaces pour alimenter leurs poches…

A ne pas oublier, ce Facteur qui distribue ses lettres de protestation et réclame une mobylette à tous les représentants d’une autorité quelconque. 

Ces derniers semblent être issus d’un prototype unique : tous intéressés par les richesses naturelles du pays, ils se servent de leur autorité pour en tirer profit. Ils sont obnubilés par leur cupidité, l’auteur en usant de figures de style comme l’ironie décrit l’absurdité de leurs préoccupations. 

 

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On ressent la satisfaction des puissants, la saudade des pauvres, ceux dont on ne tient pas compte et qui finissent par devenir transparents. 

L’écriture d’Ondjaki est exquise. J’ai mis deux semaines à lire cette oeuvre de 400 pages. L’imagination poétique et l’habileté narrative de l’auteur demandent un haut niveau d’attention. Ce roman a été un vrai exercice d’écriture pour la jeune écrivaine que je suis. 

 

Ce fut une lecture intéressante, une agréable découverte mais je suis restée sur ma faim. Certains faits ont manqué de développement selon moi notamment l’exploitation des eaux par l’un des puissants. 

 

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