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TTL 107 : Les funérailles de grand-mère

Qui dit jeudi, dit Throwback Thursday Livresque. Cette semaine, le thème est: Jeunesse/Young Adult

J’ai choisi un livre écrit par un collectif de collégiens et lycéens ivoiriens.

Ce livre N’zassa recueille les meilleurs textes des élèves des lycées et collèges de la Côte d’Ivoire, présentés lors de la 6e édition du concours littéraire Madeleine Tchicaya. Poésie, contes, nouvelles et théâtre sur le thème : « Les alliances interethniques, facteur de cohésion sociale ».

25 textes composent ce recueil collectif : 7 poèmes, 6 nouvelles, 7 contes et 4 pièces de théâtre. Des textes écrits par des collégiens et lycéens de mon beau pays la Côte d’Ivoire avec comme fil conducteur les alliances interethniques.

Mon pays a connu des tensions ethniques qui sont encore loin d’être apaisées à l’heure actuelle. Des tensions qui ne devraient en aucun cas être transmises à la jeune génération. Ce recueil collectif écrit par des jeunes est un signal fort. Les textes de ces jeunes filles et garçons rappelle les alliances existantes, scellées par les ancêtres. Ces alliances représentent en quelque sorte un pacte de non-agression entre les peuples. Au delà de la non-agression, ce pacte autorise ces peuples alliés à plaisanter entre eux.

Dans la nouvelle, éponyme du recueil, tout laisse à croire qu’il y aura des moments tristes à cause des funérailles de grand-mère. Mais les boutades des peuples alliés que sont les yacouba, les gouro, les senoufo et peuhl vont apporter sourire et éclats de rire.

Si la plupart des textes évoque les alliances entre yacouba, gouro et senoufo, d’autres textes évoque les alliances entre les bété, les dida, etc…

Les intrigues débordent d’imagination. Chapeau à ces collégiens et lycéens. Nul doute qu’on a la relève de la littérature ivoirienne.

J’ai apprécié rencontrer poésie, nouvelle, conte et théâtre au même endroit. C’est un livre à remettre à des lycéens et collégiens. Qui sait, ils auront peut-être envie de prendre aussi la plume. 😉

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Les richesses du cœur de Lise Marcy

Jeff, riche homme d’affaires anglais, est attiré par les femmes noires pulpeuses. Après sa déconvenue avec Alana, il décide de quitter Londres et part s’installer à Yaoundé. Il espère y rencontrer la femme de sa vie, qui ne saura pas qui il est avant qu’il soit sûr de sa sincérité.
Bénévole sur le chantier de construction d’une école et employé de libre service, tout laisse donc à penser que Jeff est un homme ordinaire. Il est attiré par Lydie, la fille de son patron. D’autant plus qu’elle est drôle, intelligente et belle.
Cependant, une histoire avec elle s’annonce compliquée. En effet, cette dernière s’avère vénale, méprisante et est attachée aux traditions familiales.
Sa rencontre avec Sally, la femme idéale selon ses critères va le bouleverser.

De Lise Marcy, j’ai déjà lu trois œuvres. L’une de mes règles en lecture est de ne pas lire plus de trois livres par auteur. Règle que je prends plaisir à transgresser lorsque le 4e livre que l’on me suggère semble être une tuerie ou entre dans mes envies de lecture.

Lorsque Lise Marcy m’a proposé sa prochaine parution en service presse, je n’ai pas su dire non parce que c’est de la romance et qu’il s’agit d’un couple mixte. Je suis formatée, je ne peux pas laisser passer un livre évoquant un couple mixte 😀

De qui est-il question dans cette romance ?

Jeff, le personnage principal, préfère les femmes noires, pulpeuses. Amoureux d’Alana, héroïne de la romance Black Pearl, il est obsédé par l’idée de se caser depuis qu’il l’a rencontrée. Son obsession envers la femme noire m’a un peu gênée car elle renvoie aux préjugés notamment sur la performance sexuelle des noires. Ces échanges avec son ami Phil à ce propos ont accentué ma gêne et m’ont agacée.

Il décide donc de se rendre au Cameroun pour trouver la femme de sa vie. Pour ne pas qu’on le confonde avec les blancs, ayant à leur actif plusieurs dizaines d’âge de vie, se rendant dans ces contrées pour chercher des femmes avec qui finir leurs vieux jours, Jeff désire également améliorer le cadre de vie des populations. Bel élan d’humanité, n’est-ce pas ?

J’avoue, j’ai trouvé ses motivations calculées et fausses. Que dire de la raison sous-jacente au choix du pays ?

– Pourquoi le Cameroun ?

– C’est un pays du Commonwealth, pas particulièrement ancré dans une relation esclavagiste avec l’Angleterre à l’époque.

Il est mignon, le Jeff mais la violence de l’histoire coloniale de l’Angleterre, ça ne compte pas ?

Mes réflexions mises en parenthèse, faisons un focus sur l’histoire d’amour.

L’histoire débute en 2021 et ça m’a mis un baume un cœur car j’ai hâte d’être à l’année prochaine.

Des romances lues de Lise Marcy, je pense que les richesses du cœur est celle que j’ai le plus apprécié. Il est vrai qu’il y a certains faits qui seraient invraisemblables dans la vraie vie comme le fait qu’un riche britannique devienne maçon ou épicier au Cameroun mais on ferme les yeux. Dans la romance, tout est permis…

J’ai apprécié les prémices de la relation de Jeff avec l’élue de son cœur. Le résumé de l’oeuvre nous lance sur une fausse piste, chose que j’ai appréciée car cela permet au lecteur d’hésiter jusqu’aux dernières pages. L’auteure nous fait l’économie des tergiversations qu’induit le triangle amoureux et je lui en suis reconnaissante. J’ai également apprécié que le sexe intervienne tardivement entre eux et que les scènes sexuelles soient brèves.

Au-delà de la romance, l’auteure nous offre un voyage au Cameroun à travers les mets, les paysages. Elle évoque également le poids des traditions, le choc des cultures, les préjugés raciaux et les a priori sur autrui.

L’oeuvre se lit vite. Parfait quand on veut sortir d’une panne de lecture ou tout simplement pour s’évader. Le style est très simple et accessible.

J’ai eu l’impression que les derniers événements narrés étaient précipités. J’aurais voulu que l’auteure prenne davantage son temps sur la fin pour que le lecteur profite lentement des derniers instants passés avec les personnages.

Date de publication : 06 Octobre 2020

Auto-édition

Disponible en format numérique et papier

Prix : 2,99€ au lieu de 4,99€ à partir du 6 octobre 2020

Lien d’achat : ICI

Petit bonus : un petit mot de l’auteure

Ma new romance montre les différents clichés que l’on peut avoir sur une culture qui n’est pas la notre et tente de les casser.
En effet, cette histoire change de celles auxquelles nous sommes habitués en général en France et elle mélange les cultures.
J’ai beaucoup de plaisir à faire voyager mes lecteurs dans mes romans.
J’espère que cela leur donnera donc envie de lire le roman, d’une part mais aussi de découvrir ce beau pays.

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BONI, pont culturel entre la Côte d’Ivoire et la Guyane

Mai 2018 – Salon International du livre d’Abidjan.

Serge Bilé reçoit pour sa dernière oeuvre publiée « Boni », le Grand Prix national Bernard Dadié.

J’aime acheter les œuvres qui ont reçu des prix littéraires. Je pense que c’est un exercice nécessaire pour tout auteur débutant.

Je me rends au stand où l’oeuvre est en vente et j’y achète deux autres œuvres de l’auteur au lieu de BONI. Je n’ai pas de coup de foudre immédiat avec l’oeuvre alors je remets mon achat à plus tard.

Au stand des Prix Nationaux Bernard Dadié, j’entends l’auteur parler de sa dernière oeuvre, ce pont culturel entre la Côte d’Ivoire et la Guyane via les Boni. J’entends la mélodie de sa passion pour les faits méconnus de l’Histoire des peuples noirs.

Je me rends compte du travail colossal, de l’énergie que demandent tous ses livres et j’ai envie de l’encourager à ma façon. J’achète donc Boni.

pont culturel entre la Côte d'Ivoire et la Guyane

 

Cette fresque romancée qui va de l’Afrique à l’Amérique du Sud a pour fil conducteur une femme que la mémoire des hommes a oubliée : la mère de Boni.

La première de couverture l’illustre assez bien. Pagne noué autour de la poitrine, son regard est orienté dans le même sens que celui de son fils victorieux. Derrière un grand homme se cache une femme dit l’adage. Derrière un grand homme se trouve une mère exceptionnelle.

A partir des archives et d’éléments d’anthropologie, Serge Bilé imagine la vie de la mère de Boni. Il la fait naître à Kumasi, lui donne le nom d’Adjoua. Elle est la servante d’Akwa Boni, nièce d’Abla Pokou.

Abla Pokou est une princesse Ashanti. A la mort d’Osei Tutu en 1717 se profile une querelle de succession entre ses neveux Opokou Ware et Dakon, le frère d’Abla Pokou. La querelle vire à la tragédie. Dakon est assassiné. Craignant d’être massacrée, Abla Pokou fuit avec sa famille, leurs esclaves et les soldats restés fidèles à son frère. Adjoua fait partie du cortège.

Un nouveau peuple se forme en Côte d’Ivoire : celui des Baoulé et des Agni. Il fait perdurer les traditions Akan.

Hélas, l’exil en Côte d’Ivoire ne va pas durer pour Adjoua. Elle est enlevée par des hommes, va être vendue, sa liberté sera confisquée. Avec elle, on plonge au cœur du système négrier…

Je remercie l’auteur de lui avoir redonné vie à travers cet ouvrage.

J’ai apprécié sa force de caractère, son courage, sa détermination à ne pas oublier d’où elle vient et à l’inculquer à chacun de ses enfants.

Je m’interroge. Combien de jeunes mères aujourd’hui en Côte d’Ivoire font cette transmission de leurs cultures à leurs enfants ? Je constate qu’on a une profonde rupture avec notre passé.

 

Ce livre raconte également le parcours du fils aîné d’Adjoua et celui de son peuple auquel il a donné son nom.

Boni est un chef rebelle qui a marqué l’histoire du Surinam et de la Guyane au XVIIIe siècle. Avec ses hommes, déportés de différentes contrées africaines (Loango d’Angola, des Ewé du Togo, des Fon du Dahomey, des kikongo du Congo ou encore des Akan du Ghana et de la Côte d’Ivoire), il mène la révolte contre l’esclavage, infligeant de lourdes pertes aux colons européens.

Les Boni forcent l’admiration. C’est un peuple panafricaniste sur qui l’Afrique d’aujourd’hui devrait prendre exemple : fondre les cultures pour n’en faire qu’une seule, s’unir pour défendre la liberté commune. Les Boni sont accrochés à leur héritage culturel, ils l’honorent.


 

Ce voyage culturel de l’Afrique de l’Ouest à la Guyane est plaisant tant au niveau du fond que de la forme. J’ai redécouvert via ce livre les coutumes et traditions du peuple Akan. En le fermant, j’ai eu envie de faire des recherches approfondies afin de savoir s’il y a eu des déportés issus de mes deux groupes ethniques.

J’ai apprécié cette biographie romancée, ce mélange de réalisme et de fiction.

Le niveau de langue est accessible, le livre peut se lire dès le collège. Les descriptions des lieux, de l’atmosphère, des personnages sont suffisamment claires pour nous permettre de bien nous les représenter, les transitions sont réussies. La plume de l’auteur est entraînante.

Les amateurs de culture devraient avoir ce livre dans leur bibliothèque.


 

QUELQUES INFOS UTILES

Roman édité par : Kofiba Editions

Nombre de pages : 196

Prochain événement littéraire : l’association point de lecture organise un café littéraire autour de BONI le mercredi 3 octobre 2018 à l’Institut Français d’Abidjan de 16h 30 à 18h.

 

GM signature

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L’Ombre d’une différence de Sefi Atta

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Soucieuse de son confort et de son indépendance, Deola vit à Londres, tenant ainsi à distance son pays, le Nigeria, et sa famille installée à Lagos. Marquée par une jeunesse ballottée entre deux mondes, elle manoeuvre, dans ses relations professionnelles et amicales, pour éviter de s’exposer, de cristalliser sa différence. Sous ses dehors impassibles, rires, indignations, espoirs, affections et doutes se bousculent en une émouvante effervescence. De retour au Nigeria dans le cadre d’une mission, elle retrouve sa famille, qui commémore le décès de son père, et elle cède à la tentation d’une aventure amoureuse. Cette rencontre, véritable grain de sable dans la vie bien rodée de Deola, l’amène à se libérer du carcan qu’elle s’était imposé, à dépasser son insidieuse frustration pour s’engager dans une voie risquée, mais choisie.
Avec une sobriété ciselée, une tenue remarquable, un humour incisif, une vraie tendresse pour ses personnages et pour les villes de Lagos et de Londres, Sefi Atta explore les questions de l’exil, de la famille, de l’amitié, de la féminité, de l’altérité, restant au plus près du bruissement entêtant de la vie.

l'Afrique écrit

Ce roman dresse le portrait de la société nigériane où le christianisme moderne occupe une place importante. Deola n’est pas pratiquante, elle croit en Dieu un jour sur deux. Ses réflexions parfois judicieuses sur le christianisme hypocrite, tapageur m’ont beaucoup fait rire :

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Deola, fille de bourgeois, est une immigrée à Londres. L’immigration…  Les occidentaux sont toujours des expatriés, des émigrés donc et les Africains des immigrés. Je me demande quand est-ce que la tendance va s’inverser…

Deola à travers sa propre expérience et celle de son amie Subu nous montrent comment se vivent l’immigration nigériane en Angleterre ou aux USA, l’ostracisme et le racisme. Certains nigérians en immigrant se comportent comme des Anglais, d’autres tiennent à préserver leur origine. Dans le milieu professionnel, parfois, le plafond de verre est brisé, parfois non.

Deola travaille dans une ONG qui audite des projets humanitaires dans le monde, le Nigéria y compris. Une nation riche de pétrole, pleine de potentiel qui tend encore la main. Jusqu’à quand ?

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La narratrice nous expose les habitudes hilarantes et paradoxales des nigérians à Lagos comme à Londres. Elle dresse surtout le portrait de femmes indépendantes. Des femmes qui choisissent qui elles veulent aimer, refusent de se plier aux directives des autres quand il s’agit de leurs vies. Elles font le choix de rester seule, de quitter un mariage où l’homme ne les respecte pas. 

Notre héroïne, elle, fait face à plusieurs choix : quitter Londres pour Lagos, abandonner la solitude pour un compagnon, garder un enfant non désiré ou pas.

 

Ce roman m’a séduite par son humour, sa fluidité, ses personnages pittoresques, les thématiques qu’il aborde. J’ai passé un agréable moment de lecture. Etant dans ma période « romance » j’aurais voulu vivre davantage le nouvel amour de Deola. Il a été plutôt bref pour moi. 

Vous avez une amie immigrée, trentenaire ou quadragénaire célibataire ? Ce livre est top pour son cadeau de Noël.

Christmas

 

Éditeur : ACTES SUD

Date de publication : Mai 2014 

Nombre de pages : 368 

Traduit de l’anglais (Nigeria) par : Charlotte WOILLEZ

Existe aussi en format numérique. Voir ICI

 

 

 

GM signature

 

 

 

 

 

 

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Le grand masque a menti et pas qu’un peu !

 

Résumé de l'oeuvre

Dans ce roman où l’intrigue ne laisse point de répit au lecteur, Attita Hino nous offre un sujet passionnant : la résolution d’un meurtre et la puissance dévastatrice de la vérité. Cette dernière provoquera l’écroulement des croyances ancestrales d’une partie des villageois, et sèmera le doute dans l’esprit de nombreux autres. Comme un pagne savamment tissé, l’histoire du héros de ce roman est contée avec détail et minutie, nous plongeant dès les premières lignes dans un univers captivant. La culture du peuple Palébo devient nôtre, et c’est dans les pas de cet homme intègre et courageux que nous vivons, avec lui, les épreuves de sa vie.

« Le grand masque a menti » est une œuvre riche, un livre qui emporte le lecteur dans diverses dimensions, dans une Afrique noire faite d’intrigues et de manipulations, dans une conception harmonieuse du couple assez distincte de celles qu’on connaît aujourd’hui, de l’amour fraternel et de la loyauté inconditionnelle.

 

l'Afrique écrit

J’ai beaucoup entendu parler de ce livre, on m’en a dit beaucoup de bien. Vu qu’il détenait des secrets, je l’ai inclus dans ma box littéraire du mois de Juin et je l’ai lu pour confirmer toute l’attention portée à ce livre. Il a eu le prix national du jeune écrivain 2014 et la mention spéciale au Prix Ivoire 2014. Une blogueuse m’a dit qu’il méritait de remporter le prix. 😀

Youkou Dibahou, personnage principal de l’histoire est un pêcheur Lépo, vivant dans le village de Lépossô. C’est un paébou (chef de famille) admiré par sa famille. Il a deux femmes mais elles s’entendent à merveille. L’une est la maîtresse du foyer, l’autre la femme du cœur. Elles ne sont pas des rivales juste les femmes d’un même homme. Je les ai admirées, je serais incapable de partager l’homme que j’aime même si l’autre femme est Blanche Neige.

A Dibahou a été confié, la vieille Kounoa. Son père avait hérité de cette femme après le décès de son grand-frère. Son âge très avancé, au-delà de la cinquantaine, ne lui avait pas permis de trouver preneur parmi les hommes de la famille.

La vieille Kounoa s’obstine à être la maîtresse du foyer de Dibahou. Aigrie et méchante, elle injurie à longueur de journée les membres de la famille, insulte les morts qui sont sacrés chez les Lépo, finit par pousser à bout Dibahou. Poussé par la colère, il frappe cette vieille sorcière qui frappe à son tour Dibahou là où ça fait mal, très mal.

Qui pense avoir affaire à une simple histoire sera fort surpris.

La deuxième partie de l’oeuvre est encore plus intéressante, pleine de surprises. Deux parties vont s’opposer : celle du grand masque et la famille de Dibahou. Chaque partie use des moyens en sa possession pour préserver sa vérité. Les convictions s’affrontent et la lutte est violente.

J’ai admiré la force de Dibahou et son courage, sa femme de cœur Mamy n’est pas en reste. Elle aime son mari et n’hésite pas à épouser sa cause.

La vérité surgit, les mystères et croyances se défont. On a mal face à l’injustice, la violence. On ne lâche pas le livre, on a envie de voir comment cette histoire finira et à qui raison sera donné.

Le grand masque a menti est un bon roman du terroir, il nous rappelle nos us et coutumes, ce passé culturel que l’on oublie ou renie, il jette un regard critique sur nos traditions africaines.

J’ai apprécié la pudeur dans la narration des scènes intimes, l’amour que les personnages  se portent. J’ai apprécié la fin de l’histoire, synonyme de renouveau.

J’ai admiré l’auteure pour ses proverbes pittoresques. Elle a réussi à donner une âme à ses personnages, on oublie qu’on est dans une fiction, on vit le récit. Elle a réussi à surprendre.

Ce roman n’est pas loin du coup de cœur. Pour la richesse de l’écriture et du contenu, il méritait bien plus qu’une mention spéciale au Prix ivoire 2014 mais il faudrait que je lise tous les ouvrages finalistes au Prix ivoire pour confirmer mes dires. 😀

 

Christmas

Éditeur: NEI-CEDA

Année de publication : 2014

ISBN : 2844876145 – 9782844876140

Nombre de pages : 269

 

 

Le Prix Ivoire pour la Littérature Africaine d’Expression Francophone 2014 a été attribué à la Marocaine Bahal Trabelsi pour son roman Parlez-moi d’amour.

Les autres ouvrages en lice étaient :
– Les charmes de Kenza de NADIA ADIB,
– L’insondable destin des hommes de KAMA SYWOR KAMANDA,
– Le troisième sexe de LEANDRE SAHIRI.

Avez-vous déjà lu ces œuvres ?

 

signature coeur graceminlibe

 

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Throwback Thursday Livresque #7 – Années 90, année rebelle

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Le Throwback Thursday Livresque est un rendez-vous livresque initié par BettieRose Books.

Le but est de parler d’une « ancienne » lecture (pas la toute dernière ou l’actuelle) autour d’un thème qu’elle aura au préalable défini.

Le thème de cette semaine est : années 80 ou années 90 (date d’écriture ou date de l’action)

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Très contente que Betty ait validé mon thème !!!

 

J’ai décidé de vous présenter un roman écrit en 1998 dont je suis fière d’avoir un exemplaire

 

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Résumé 

Enlevée par les frères du vieux Sando à qui on l’avait mariée de force il y a vingt ans, Malimouna avait fui son mari. Aujourd’hui, bien qu’adulte et mariée par amour à Karim, la tradition l’oblige à rejoindre son véritable époux de gré ou de force dans son village de Boritouni. Cet événement permet à Malimouna de regarder dans le rétroviseur pour faire la rétrospective de sa vie. Une existence de femme rebelle. Rebelle contre l’excision, le mariage forcé, la polygamie, l’infidélité conjugale, le racisme qui minent les mariages interraciaux, la violence sur les femmes. Tous ces maux qui entravent l’épanouissement des femmes.

Le pays d’où vient Malimouna est imaginaire. C’est quelque part en Afrique. 

Rebelle est un livre courageux, un roman féministe qui porte haut la voix des femmes. Là où les femmes se taisent, Fatou Keita à travers Malimouna crie à gorge déployée pour dénoncer les maux de femmes. Ceux qu’on excuse…  Rebelle est un roman qui dénonce les traditions qui font du mal à la femme.

Le parcours initiatique de Malimouna rappelle tous les combats de la femme : la lutte contre les discriminations, les idées reçues et les violences perpétrées contre des millions de femmes corvéables ; la lutte pour l’égalité, la liberté, l’indépendance, la justice, l’accès à l’instruction.

J’ai admiré la force de Malimouna qui n’hésite pas à dire non. Elle prend des coups, les rend autant que possible avec diplomatie. J’ai beaucoup aimé sa relation avec Philippe, à l’époque, j’étais une grande fan des couples mixtes 😀

Les nombreuses thématiques développées font de Rebelle, un roman complet. Ce roman est révoltant, touchant, plein de sensibilité. On n’en sort pas indemne de cette histoire. 

Et vous, quel livre proposeriez-vous pour ce thème ? 

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Coup de cœur pour la saison de l’ombre ?

« Si leurs fils ne sont jamais retrouvés, si le ngambi ne révèle pas ce qui leur est arrivé, on ne racontera pas le chagrin de ces mères. La communauté oubliera les dix jeunes initiés, les deux hommes d’âge mûr, évaporés dans l’air au cours du grand incendie. Du feu lui-même, on ne dira plus rien. Qui goûte le souvenir des défaites ? »

Nous sommes en Afrique sub-saharienne, quelque part à l’intérieur des terres, dans le clan Mulungo. Les fils aînés ont disparu, leurs mères sont regroupées à l’écart. Quel malheur vient de s’abattre sur le village ? Où sont les garçons ? Au cours d’une quête initiatique et périlleuse, les émissaires du clan, le chef Mukano, et trois mères courageuses, vont comprendre que leurs voisins, les Bwele, les ont capturés et vendus aux étrangers venus du Nord par les eaux.

Dans ce roman puissant, Léonora Miano revient sur la traite négrière pour faire entendre la voix de celles et ceux à qui elle a volé un être cher. L’histoire de l’Afrique sub-saharienne s’y drape dans une prose magnifique et mystérieuse, imprégnée du mysticisme, de croyances, et de « l’obligation d’inventer pour survivre. »

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Certains romans nous imposent le silence, forcent notre respect, nous ordonnent la concentration. La saison de l’ombre fait partie de ceux-là. 

Ce roman historique impose le silence et la concentration tant par sa forme que par son fond. Sa beauté saisissante fige les esprits, les conduit là où elle veut bien les mener.

Cette oeuvre complexe, puissante et émouvante nous porte au seuil d’un village de l’Afrique noire, au cœur du clan Mulungo, au crépuscule de la traite négrière.

Dans ce décor planté aux confins d’une brousse, on vit la disparition de fils, la douleur des mères, l’incompréhension des chefs de famille, la confusion des responsables de la communauté.

Qui a causé cet incendie ? Qui a enlevé les 10 jeunes et les hommes d’âge mur ? Pourquoi ? Où les ont-ils menés ? Reviendront-ils ? Sont-ils en vie ?

Les interrogations sont lourdes, les peurs s’amplifient, l’écho silencieux des réponses est affreux. 

On vit l’histoire via le lien mère-fils. Quel amour terrestre est plus grand que celui d’une mère ? Quelle douleur est plus grande que celle de se voir arracher un fils ? Quel lien est plus fort que celui d’une mère et son enfant ?  Ce lien fort, rompu porte la tristesse à son paroxysme, donne du souffle à l’histoire. 

On est frappé par sa détermination d’Eyabe dans sa quête de retrouver les fils qui manquent à la communauté. 

Eyabe ne se pose pas la question de la direction à suivre. Quelque chose la pousse, la conduit. L’amour des mères pour leurs fils n’a que faire des astres pour trouver son chemin. Il est lui-même l’étoile. 

Depuis qu’elle s’est mise en route pour trouver le pays de l’eau, elle considère cette dernière comme une puissance hostile, une force néfaste qui lui a ravi son premier-né. L’enfant dont la venue au monde a consacré sa féminité aux yeux du clan. Celui grâce auquel il lui a été donné de se découvrir, de se connaître elle-même telle qu’elle ne s’était jamais envisagée. Inventive : combien de mélodies lui sont venues lorsqu’il fallait le bercer ? Savante : elle avait la réponse à ses questions, pas toujours, mais souvent. Douce : oui, elle dont l’adolescence s’était passée à rivaliser au tir à la fronde avec ses frères. 

On est ému par la douleur des mères qui jamais ne reverront leurs enfants, choqué par l’esprit de clan égoïste qui règne chez les Bwele et la cruauté des Isedu. « La vie humaine ne leur est pas une chose sacrée. » 

Des écrits ont raconté l’expérience douloureuse de ceux qui ont été esclaves, forcés à quitter leur terre, oublier leur identité, être d’autres hommes. 

La saison de l’ombre a le mérite de raconter l’expérience douloureuse de ceux qui sont restés, ceux qui ont été forcés à vivre avec l’absence, devenir des êtres amputés de leur mémoire.

En 287 pages, l’auteur nous décrit le déclin du peuple Mulungo, le péril d’une communauté: la disparition de ses us et coutumes, ses traditions, son mystère, sa philosophie, sa langue, ses richesses, ses croyances.

L’auteur évoque également un peuple neuf, la cendre de plusieurs peuples éteints :

Ses pas l’ont conduite en ce lieu appelé Bebayedi, un espace abritant un peuple neuf, un lieu dont le nom évoque à la fois la déchirure et le commencement. Ceux qui sont ici ont des ancêtres multiples, des langues différentes. Pourtant, ils ne font qu’un. Ils ont fui la fureur, le fracas. Ils ont jailli du chaos, refusé de se laisser entraîner dans une existence dont ils ne maîtrisaient pas le sens, happer par une mort dont ils ne connaissaient ni les modalités, ni la finalité. Ce faisant, et sans en avoir précisément conçu le dessein, ils ont fait advenir un monde. Prenant le statut d’ancêtres, ils légueront une langue faite de plusieurs autres, des cultes forgés dans la fusion des croyances. 

 

Elle raconte avec une plume sophistiquée ce qui a été et ne sera plus, ce qu’on a définitivement perdu ; le pan d’un passé qu’on tait parce qu’on l’ignore et auquel on ne prête guère attention. Elle raconte ce qu’on fait perdre aux autres en cherchant à posséder sans mesure. 

J’ai été saisie par la lecture de cette oeuvre qui porte l’Afrique et ses mystères,  j’ai adoré la plume de l’auteur. Elle me donne l’envie de me surpasser pour améliorer mon style d’écriture. 

La nuit tombe d’un coup, comme un fruit trop mûr. Elle s’écrase sur le marais, la rivière, les cases sur pilotis? La nuit a une texture : celle de la pulpe du kasimangolo, dont on ne peut savourer toute la douceur sucrée qu’en suçant prudemment les piquants du noyau. La nuit a une odeur : elle sent la peau de ceux qui sont ensemble par la force des choses. La nuit sent les souvenirs que le jour éloigne… La nuit charrie les réminiscences du dernier jour de la vie d’avant…

Il m’a manqué quelques éléments pour ne pas l’inscrire à la liste de mes coups de cœur notamment les noms qui ne sont pas évidents à retenir car certains se ressemblent tant que l’on finit à ne plus savoir qui est qui et les longueurs. La lectrice impatiente que je suis aurait aimé que le chemin qui mène à la découverte des fils perdus soit moins long. 

Léonora Miano est un auteur que je vais maintenant suivre de très près. Avez-vous lu l’une de ses œuvres ? Laquelle me conseillez-vous ?

Des phrases à ne pas oublier

Tout ce qui vit abrite un esprit. Tout ce qui vit manifeste la divinité. 

Ce qui existe naturellement ne devient bon ou mauvais qu’au contact d’une volonté. 

C’est d’être nommé qui fait exister ce qui vit. 

L’auteur 

Née à Douala (Cameroun)  en 1973, Léonora Miano vit en France depuis 1991. L’intérieur de la Nuit, son premier roman, est paru en 2005. Une dizaine d’autres ont suivi depuis lors, recevant de nombreuses distinctions littéraires. Son écriture s’attache aux expériences subsahariennes et afrodescendantes, les inscrivant dans la conscience du monde. La Saison de l’Ombre a reçu le prix Femina 2013. 

La publication de l’oeuvre 

Editée par Grasset en 2013

Intégrée à La Collection « Terres solidaires » au 4e trimestre 2015. La Saison de l’Ombre, 10e titre de la collection « Terres solidaires » a été choisi par un comité de lecture panafricain composé de professionnels du livre, d’auteurs et de journalistes, à partir d’une sélection réalisée par Nathalie Carré. La collection « Terres solidaires » créée en 2007, repose sur un principe de « restitution » au Sud de textes littéraires écrits par des auteurs africains, publiés initialement au Nord. Par le biais de la coédition solidaire et avec la collaboration d’éditeurs français , des éditeurs en Afrique publient à des prix les plus accessibles possible pour le lectorat, des textes majeurs d’auteurs africains. 

Mon défi PKJ

La lecture de la saison de l’Ombre m’a permis de valider 7 challenges du défi Pocket Jeunesse:

1_ Lire un auteur qui a une double nationalité : Léonora Miano est camerounaise et française

10_ Lire un livre qui a un nombre de chapitres impair : La saison de l’ombre en a 5

16 _ Lire un roman avec un méchant vraiment très méchant : la princesse Njole

18 _ Penser très rapidement dans sa lecture qu’il va s’agir d’un coup de cœur

21_ Lire un livre qui vous a émue

23_ Lire un livre avec de l’herbe représentée sur la couverture 

25_Lire un livre qui met en scène des meilleures amies.

 

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