Ce mois, la sympathique communauté des bloggeuses/youtubeuses noires francophones a choisi comme thème pour le BYN French Challenge : « Working Girl ».
J’ai la flemme d’écrire en ce moment mais pour l’occasion, j’ai eu envie de vous présenter l’une de mes Working Girl : Aissata Bah. Elle est l’héroïne d’une histoire que j’ai commencé en 2014. Elle est en stand-by parce qu’il me manque l’inspiration. 😦
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5 heures,
Silence du jour naissant… Joie quotidienne d’avoir accompli mon devoir : la prière de Fajr, porteuse des meilleurs mérites macha Allah. Elle m’assure la protection d’Allah, ma vitalité et ma bonne humeur. Elle prépare ma posture mentale de la journée.
Je ne quitte pas mon tapis. Les yeux fermés, je répète une dizaine de fois :
»Il n’y a pas d’autre divinité à part Allah, l’Unique, sans aucun associé, à Lui la royauté et à Lui les louanges; Il donne la vie, comme Il donne la mort; et Il est le Plus Puissant sur toutes choses ».
Je souris. Allah a préparé ma journée, ses bénédictions m’accompagnent.
6 heures 30,
Mon regard est complètement hypnotisé par les informations économiques et financières qui s’enchaînent en boucle sur l’écran de la télévision. Je suis une passionnée du monde financier, j’en ai fait mon métier. Je me déconnecte quelques minutes de mon univers favori quand Daoud pose son sac d’école devant moi.
7h 30,
Ma voiture garée à l’emplacement réservé à la Directrice Générale Adjointe, je rentre dans les locaux de la CIBA. Déjà deux ans que j’occupe cette fonction. Le temps passe si vite ! Les salutations respectueuses s’enchaînent à mon arrivée dans le hall de la banque, elles me rappellent mes pas effectués, mes routes empruntées pour atteindre ce niveau de responsabilité. J’ai pensé comme un homme et agi comme une femme…
12h 30,
Ma 1ère réunion hebdomadaire avec les directeurs fonctionnels de la Banque vient de s’achever. J’ai quelques minutes devant moi avant ma vidéoconférence avec Laurence Peyraut Bertier, co-présidente de la fédération sectorielle Financi’elles, parrainée par Christine Lagarde et qui regroupe 12 réseaux internes de femmes cadres du secteur de la banque, de la finance et de l’assurance. Son but est d’accélérer l’accès des femmes au sommet des organisations de la finance. Laurence est une grande amie, elle m’a été d’une grande aide dans ma carrière à la Banque Pictet, une banque privée Suisse. Nos moments d’échange sont de puissants viviers d’informations. L’ignorance est une menace que je gère au quotidien et avec beaucoup de tact. Je suis membre de plusieurs réseaux, en faire partie est un pilier essentiel d’une carrière réussie.
Je jette un coup d’œil à la suite de mon agenda aussitôt mon entrevue, avec Laurence, terminée. Je dois déjeuner avec Honorine Guikahue, Rédactrice en chef du magazine féminin Femm’ Essentielles. Je dois ensuite rencontrer toutes les femmes de la direction clientèle. J’ai lancé, il y a deux semaines, un projet : amener toutes les femmes à tous les niveaux de l’organisation à prendre une part au développement de la banque. En atelier, nous échangeons sur la banque de demain. J’aime les voir s’impliquer dans ce projet, considérer leur emploi non pas comme une source de revenus mais comme une solution au changement.
Les rendez-vous d’affaires s’enchaînent : rendez-vous de négociation, rendez-vous de réflexion. Les heures défilent, essayant d’emporter avec elles mon énergie mais je tiens bon. Heureusement que le café existe.
19 heures,
Je prends la route du Sofitel Ivoire où un afterwork entre Directeurs Généraux des entreprises installées en Côte d’Ivoire se déroule. Je ne refuse aucune invitation qui pourrait m’aider à avancer les bons pions sur l’échiquier de ma carrière.
Je suis accueillie par le Directeur Général d’une banque concurrente, Martial NGUEPI, un homme franc avec un sens aigu des affaires. En gentleman, il me tend un verre de cocktail sans alcool, tient une assiette de biscuits salés d’où je pioche quelques biscuits salés, me présente aux autres directeurs généraux avec qui il discutait intelligence économique avant que je n’arrive. Nous échangeons de longues minutes avant que je ne rejoigne les directrices générales présentes. Nous travaillons actuellement à la création d’un réseau professionnel féminin en Côte d’Ivoire. Je ressens le besoin d’impacter le féminin à l’ivoirienne.
Je sens à plusieurs reprises sur moi le regard plein de convoitise de certains hommes, je suis une gazelle exposée à la vue de plusieurs lions.
On ne peut empêcher les hommes d’être ce qu’ils sont. Mon tailleur pantalon marsala n’est pourtant pas affriolant et je n’ai pas la forme de rêve tant convoitée en Afrique.
- Comment allez-vous Mme Bah ?
- Je vais bien, merci. réponds-je en me tournant vers mon interlocuteur, M. Assangni, Directeur Général d’une entreprise de télécommunications de la place.
- Ces afterwork devraient se faire plus régulièrement. Une fois par mois, ce n’est pas suffisant, n’est-ce pas ?
- Oui mais nos agendas sont bien souvent trop remplis.
- En effet… J’ai été très heureux d’apprendre qu’une femme prenait les rennes de la BACI. déclare-t-il en accrochant son regard au mien. Votre mari a dû être très content. Tous les hommes rêvent d’avoir une femme comme vous.
- Je suis divorcée. dis-je avec un léger sourire.
- Vu ce que vous dégagez comme charisme et le charme de votre beauté juvénile, vous ne tarderez pas à être une épouse à nouveau.
- Peut-être… Cela ne figure pas dans mes objectifs de l’année.
- Vous ne me ferez pas croire ça. affirme-t-il en portant son verre à ses lèvres charnues. Toute femme a besoin d’amour. Et quand on n’a pas l’occasion de le vivre en tant qu’épouse on le vit en tant que maîtresse.
- Je ne suis pas contre le fait de partager des parts de marché avec un concurrent mais partager un homme, non.
- Ah !
- Je vous prie de m’excuser. Je dois rejoindre ma famille.
- Déjeunez-vous avec votre famille demain ? Ça me ferait plaisir de déjeuner en votre compagnie. exprime-t-il le sourire aux lèvres, la main caressant son ventre bedonnant.
Il n’est absolument pas le genre d’homme qui me fait craquer et il est marié. Pour rester professionnelle, je lui demande sa carte. Je l’appellerai pour lui donner mes disponibilités.
Je quitte avec soulagement mes escarpins, conduire avec est souvent un supplice surtout quand ils sont neufs. Je visualise le contenu de ma soirée : appeler ma mère et mes sœurs, vérifier les devoirs de Daoud, faire la …
Ma sonnerie Skype retentit. Le nom d’Amos s’affiche à l’écran. Il veut sûrement me faire le compte-rendu de sa journée. Nous menons un projet de participation financière dans la Banco Caboverdiano de Negócios à Praia.
Je lui expose mes doutes sur certains points, promets de le rappeler demain après ma réunion avec notre équipe d’audit.
J’écoute Lucky Dube durant le trajet pour me détacher du boulot, achève mon processus de relaxation avec une bonne douche froide. Je noue la serviette à ma poitrine, la défais aussitôt. J’ai 41 ans et mon corps a changé.
Les souvenirs de ma vie de femme mariée affluent à mon cerveau. Je les chasse d’un geste de la main. Pas besoin de vivre au passé quand de belles choses meublent le présent. J’ai vécu ma saison de l’amour, aujourd’hui, il est temps de vivre pleinement la saison de ma carrière.
J’enfile un boubou, chausse mes sandales d’intérieur. Je vais rejoindre mon fils, l’unique homme pour qui mon amour jamais ne tarira.
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