Publié dans Arrêt sur une oeuvre

Un ailleurs à soi – Emmelie Prophète

Tout un peuple se prépare à fuir, s’inventant un ailleurs à défaut d’un avenir. Partir est un mythe auquel personne n’échappe. Au Ayizan, chic restaurant de Pétion-Ville, se font et se défont les voyages. Lucie sert les clients le jour et vend son corps la nuit. Maritou fuit la haine de Jeannette et la pitié de Clémence ses demi-sœurs. Elle vomit son angoisse et sa solitude jusqu’à sa rencontre avec Lucie. Elles s’apprivoisent jusqu’à s’aimer. Un ailleurs à soi, miroir où se tissent illusions et vœux de départ.

l'Afrique écrit

Ses cheveux sont crépus et courts comme les hommes, ses seins menus. Maritou ne porte pas de vêtements féminins, elle est un garçon manqué. Elle est attirée par les femmes en particulier Lucie.

Lucie est grande et mince avec des fesses généreuses. Sa relation charnelle avec Maritou est à l’opposé de celle qu’elle vit avec les hommes. Elle leur donne son corps en échange de l’argent.

Les deux femmes sont issus d’univers familiaux difficiles.

Maritou est le fruit d’une infidélité conjugale, sa demi-sœur Jeannette la hait. Elle est marginalisée dès l’enfance à cause de ses vomissures récurrentes et son surpoids.  

Lucie a eu un père odieux et violent qui vraisemblablement la battait, voire la touchait. Un contexte familial où elle vivait une vie résignée.

Maritou conte ses envies d’ailleurs à Lucie. Elle aimerait aller là-bas, n’importe où. Elle aimerait être là où elle ne serait pas marginalisée, serait capable de faire ce qu’elle veut, d’être ce qu’elle veut.

Le ton du roman est très mélancolique. On sent un peuple complètement désabusé. Les haïtiens veulent être partout sauf chez eux. Comment tout un peuple en est arrivé là ?

Julien, barman au Ayizan essaie de dissuader les jeunes via des dévotions et des offrandes aux ancêtres mais ils continuent de s’en aller jour après jour voir ailleurs. Le quartier se vide. Les ténèbres de nos vies illuminent les ailleurs…

Julien était triste et ne savait pas comment l’exprimer, comment expliquer à Bernadette, à Mario, à ceux qui travaillaient à la cuisine, au bar, dans son quartier, dans le pays, qu’ils avaient eux aussi de bonnes raisons d’être tristes. On ne devait pas avoir pour but dans la vie de quitter son pays, d’abandonner les loas, la terre, sans essayer, sans trouver une formule, créer du rêve. 

Le roman traite de l’immigration et milite pour la libre circulation des personnes.

Personne au final ne devrait être forcé de rester sur un seul territoire, fixé à sa communauté de naissance. Il faudrait toujours pouvoir choisir, vivre après tout est un grand mouvement.

Il est facile pour des occidentaux d’immigrer et d’être chez eux sur la terre qui les accueille comme c’est le cas pour Quentin, le propriétaire  du Ayizan et amant de Lucie. Cela devrait être le cas pour tout le monde.

La condition féminine est également évoquée. L’indépendance vis-à-vis des stéréotypes liés aux devoirs et rôles des femmes (soumission des épouses, la cuisine comme job des filles) est revendiqué.

Un ailleurs à soi c’est le carrefour des solitudes, des regrets, des rancunes contenues. C’est également le désir de liberté géographique, sexuelle. Ça a été une rapide et sympathique lecture. L’histoire est un bloc, il n’y a aucun chapitre. Le vocabulaire est varié. Il n’y a pas assez de descriptions des lieux, on est concentré sur les sentiments des personnages.

Emmelie Prophète est une plume à découvrir. Son style est fluide, tendre. 

Pour plus d’informations sur le roman, cliquez ICI

 

GM signature

Publié dans Revue cinéma

THE CEO, un film de Kunle Afolayan divertissant mais…

Quand j’ai moins de livres à lire, je regarde des films. La semaine dernière pour célébrer la présence d’une amie en vacances à Abidjan et soutenir le cinéma africain, j’ai regardé THE CEO, un film de Kunle  Afolayan, producteur nigérian. Ce film regroupe des acteurs de plusieurs nationalités : kenyane, haïtienne, nigériane, béninoise, ivoirienne, sud-africain, marocaine.

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SYNOPSIS

Transwire communication, société de téléphonie mondiale, est l’opérateur leader au nigéria. Le DG, un expatrié à la retraite, décide d’envoyer cinq cadres suivre un cours de leadership dans une station balnéaire.
Cette escapade est organisée dans le but de désigner le nouveau Président Directeur Général de la société : THE CEO.
Le formateur, le mystérieux Dr Amet Zimmerman, commence le cours en invitant les dirigeants à se livrer à une partie de jeu de chaises musicales d’enfant afin d’étudier leur mode opératoire. Complot et trahison prennent le dessus. Un cadavre est retrouvé le lendemain matin, « mort par accident ». Un par un, chaque candidat commence à être éliminé, jusqu’à ce qu’il n’y en reste que deux.

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Je suis restée sur ma faim avec THE CEO. Avec le trailer et le synopsis, je m’attendais à être fortement impressionnée tant par la technique du film que par l’intrigue mais mes attentes sont restées insatisfaites.

Il y a eu un réel travail dans la réalisation du film, rien à voir avec les films nollywoodiens que je regarde sur Youtube. J’ai apprécié le choix des musiques, les costumes qui sont un bel hommage à la mode africaine. Le cadrage était excellent, les fondus également. J’ai apprécié que les bons côtés de l’Afrique soient mis en avant.

Le casting a aussi été excellent. J’ai énormément admiré :

  • Riikard (Nico Panagio), le winner. Il est là pour gagner et cela se sent dans sa gestuelle, son attitude. J’ai aimé son arrogance, sa détermination, son franc parler et son sex appeal. Ce mec est du chocolat blanc !

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  • Kola (Wale Ojo), le playboy, le bon confident, le leader qui ne se met pas en avant. Il a joué son rôle à la perfection.

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  • Dr. Zimmerman (Angelique Kidjo) a parfaitement joué son rôle. Qui aurait cru que la diva jouerait aussi bien qu’elle chante ! J’ai aimé son sang froid, son charisme.

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  • La surintendante Ebenezer (Hilda Dokubo). Elle a joué le rôle d’un vieux policier qui avait été dans le rôle pendant plus de deux décennies et elle n’était même pas habitué à un ordinateur, mais préférait la vieille machine à écrire. Elle apporte une touche d’humour et de fraîcheur à ce décor si sombre.

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Les autres acteurs principaux comme Eloise (Aurelie Eliam) et Yasmin (Fatym Layachi) qui m’ont moyennement convaincue.

THE CEO est une histoire d’ambition, de pouvoir, de corruption pour la protection des intérêts dans une Afrique moderne. Chaque prétendant au poste de CEO avait un squelette dans le cadavre. J’ai apprécié l’originalité de l’intrigue et le suspense qui l’accompagne. Choisir le CEO d’une entreprise de télécommunications en organisant un jeu de chaises musicales, il fallait la trouver l’idée.

L’intrigue était bonne mais elle a fini par s’écrouler. Le suspense, le frisson se sont mués en incompréhension.

J’ai trouvé que certains secrets honteux n’étaient pas très recherchés.

Certaines scènes n’étaient pas strictement nécessaires comme celle du Maroc où un frère de l’un des cadres a été appelé au téléphone. On aurait pu se contenter d’entendre la voix du frère.

J’ai eu un grand moment de solitude à la fin du film. J’ai eu l’impression d’avoir assisté à un cours de physique quantique. J’ai été agréablement surprise que le tueur ne soit pas celui auquel je pensais mais je n’ai absolument pas compris ses intentions qui motivaient les meurtres.

Je n’ai pas non plus compris l’intervention des chinois. Bref ! La fin m’a laissée perplexe.

Pour moi, THE CEO mérite bien un

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