Publié dans Arrêt sur une oeuvre

Nouvelles du monde #3 : Soudan

Le Soudan est un immense pays abritant une mosaïque de cultures, de langues et de religions : Nubiens et Arabes, mais aussi Fur et Massalit à l’ouest, Dinka et Nuer au sud, Beja à l’est, les uns étant musulmans, les autres chrétiens ou animistes…

Hormis Tayeb Salih, auteur de Saison d’une migration vers le Nord, un roman qui a connu un franc succès tant dans le monde arabe qu’en Occident, peu d’écrivains soudanais ont réussi à faire entendre leur voix à l’extérieur de leur pays. Ce recueil de nouvelles entend faire connaître quelques-uns d’entre eux qui abordent, souvent avec humour, les difficultés auxquelles sont confrontés leurs compatriotes depuis plusieurs décennies : guerre, misère, clivages confessionnels et ethniques, exil… Ils viennent des quatre coins du pays mais s’expriment tous en arabe. Ils nous content les aventures d’un citadin venant d’acquérir un char, de villageois fâchés contre les dieux, d’un enfant des rues embourbé dans la misère de la capitale ou encore d’un âne en manque de reconnaissance.

l'Afrique écrit

Après Nouvelles de Nouvelle-Calédonie, Nouvelles du Mexique, Cap sur le Soudan.

Des six auteurs de ce recueil, je ne connaissais que la plume d’Abdulaziz Baraka Sakin. Ce recueil était donc un voyage vers l’inconnu à 83% ;  une prise de risque récompensée car j’ai passé un bon moment de lecture en compagnie d’auteurs soudanais talentueux. Leurs plumes sont captivantes.

Chaque nouvelle est précédée d’une brève description de son auteur. Le lecteur peut ainsi faire plus ample connaissance avec les auteurs.

Commençons avec le char d’assaut d’Ahmad Al-Malik. Une nouvelle qui relate l’histoire d’un homme propriétaire d’un char et voyant peu à peu l’attitude de ses voisins changer. Une nouvelle qui tient de l’absurde. J’ai apprécié l’ironie subtile de ce texte.

Lanji, la vendeuse de Merissa, nouvelle écrite par Hisham Adam, est l’histoire de Lanji, une jeune fille originaire du sud du pays, chassée de son village par la guerre civile. Elle débarque dans la capitale, remplie d’espérance. Mais la ville est-elle le paradis qu’elle espère tant ? Une nouvelle qui montre la dureté du quotidien.

Une femme du camp kadis d’Abdulaziz Baraka Sakin évoque la vie d’une femme qui doit s’organiser avec minutie pour travailler sans relâche et en même temps allaiter son petit. 

Dans L’âne du prédicateur d’Abdelghani Karamallah, on a une vision des hommes par l’œil d’un animal : un âne. Ce dernier fait le portrait de la société, évoque sa vie de dur labeur dénué de reconnaissance.

Histoires de portes de Rania Mamoun est l’histoire du désespoir d’un homme.

J’ai eu un coup de cœur pour la nouvelle de Stella Gaetano : Des mondes inconnus sur la carte. Un frère et une sœur qui à travers leur condition nous montrent les conditions cruelles des mendiants dans les rues des grandes villes soudanaises.

Nouvelles du Soudan évoque ceux qui fuient la guerre civile, ceux d’en bas qui n’arrivent pas à se défaire du compagnon cruel qu’est la pauvreté. Il y a du rire, de l’absurde, des pincements au cœur, de la souffrance. C’est le 3e livre de la collection que je lis et je recommande.

 

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