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Souvenirs d’enfance avec Petit pays de Gaël Faye

Avant, Gabriel faisait les quatre cents coups avec ses copains dans leur coin de paradis. Et puis l’harmonie familiale s’est disloquée en même temps que son «  petit pays  », le Burundi, ce bout d’Afrique centrale brutalement malmené par l’Histoire.
Plus tard, Gabriel fait revivre un monde à jamais perdu. Les battements de cœur et les souffles coupés, les pensées profondes et les rires déployés, le parfum de citronnelle, les termites les jours d’orage, les jacarandas en fleur… L’enfance, son infinie douceur, ses douleurs qui ne nous quittent jamais.

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J’ai tenu à lire ce livre pour trois raisons :

  1. Il a reçu des prix (mon challenge de lecture en 2017)
  2. Je le classe dans la littérature africaine
  3. J’en ai entendu beaucoup de bien

Gaby est un homme mûr mais avant il a été un enfant. Franco-rwandais, il est né à Bujumbura. Il raconte avec douceur ses souvenirs d’enfant avant la guerre et pendant celle-ci. Il m’a fait découvrir le Burundi : ses allées, ses odeurs, les habitudes des Bujumburais. 

J’ai souri en lisant ses bêtises d’enfant, les moments passés avec ses amis : les jumeaux, Gino, Armand.

J’ai fini par perdre mon sourire quand les conflits politiques ont débuté. Au Burundi comme au Rwanda, ils trouvent leurs sources dans la haine que se vouent les Hutu et les Tutsi. 

J’ai quitté le climat doux, innocent, insouciant de l’enfance, j’ai été projetée dans le monde violent des adultes où le pardon est un art difficile, la rancune tenace. 

Dans ce roman, tous nos sens sont sollicités :

  • On voit des familles unies et des familles ravagées 
  • On sent le parfum de la joie et l’effluve de la mélancolie,
  • On entend les éclats de rire et les gémissements de souffrance,
  • On touche l’espoir et le désespoir,
  • On goûte au temps du bonheur et du malheur. 

Le narrateur évoque avec retenue l’horreur du génocide rwandais et de la guerre civile burundaise. Guerre civile dont j’en sais un peu plus grâce à ce livre. 

L’attrait de ce livre réside dans l’alliage parfaitement dosé de la douceur et de la violence, du comique et du drame.

Ce fut une belle lecture sur l’Histoire de la région des Grands Lacs, le devoir de mémoire, l’amitié, l’éloignement de sa terre natale. Il est temps pour moi de découvrir l’auteur en tant que chanteur. Avez-vous des titres à me proposer ?

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  • Broché: 224 pages
  • Éditeur : Grasset (24 août 2016)
  • Collection : Littérature Française
  • Poche: 224 pages
  • Éditeur : Le Livre de Poche (23 août 2017)
  • Collection : Littérature & Documents

Extrait

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Je vous ai préparé un joli calendrier de l’Avent littéraire. ❤ Pour découvrir le jour 1, cliquez ici

 

 

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Lu : Délivrances de Toni Morrison

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Dans son onzième roman, qui se déroule à l’époque actuelle, Toni Morrison décrit sans concession des personnages longtemps prisonniers de leurs souvenirs et de leurs traumatismes.

Au centre du récit, une jeune femme qui se fait appeler Bride. La noirceur de sa peau lui confère une beauté hors norme. Au fil des ans et des rencontres, elle connaît doutes, succès et atermoiements. Mais une fois délivrée du mensonge – à autrui ou à elle-même – et du fardeau de l’humiliation, elle saura, comme les autres, se reconstruire et envisager l’avenir avec sérénité.

l'Afrique écrit

 

Comment se sent-on quand  :

  • on doit sans cesse quémander l’attention de sa mère ?
  • notre mère n’ose pas nous toucher et déteste notre couleur de peau ?
  • on est regardé de travers à cause de notre couleur de peau ?
  • on est la responsable du départ de son père ?
  • on abuse de nous et que notre mère reste silencieuse ?
  • notre mère se libère de sa responsabilité parentale, nous livre à nous-même ?
  • on est injustement accusée, victime de propos mensongers, et que notre vie vole en éclats ?

Comment doit-on réagir quand on vole l’innocence de notre frère bien-aimé en abusant de lui, en lui ôtant la vie ?

Comment faire le deuil de son passé ?

Qu’est-ce qu’on est prêt à faire pour être aimé ?

Ces interrogations sont l’architecture de ce roman choral. A tour de rôle Lulu Ann (ou Bride), Brooklyn, Sofia, Booker, Rain et Sweetness répondent à ces questions en exposant les fautes commises, les rancœurs. Ils ont tous un point commun : ils portent un fardeau. Un fardeau qu’ils ont choisi de porter, un fardeau qu’on leur a sommé de porter. Certains ont besoin de pardonner, d’autres ont besoin de se faire pardonner.  

J’ai été attendrie par Rain, cette petite fille débrouillarde, au caractère bien trempé qui a connu bien des misères mais les dédramatise.

Ce roman aborde des sujets difficiles comme les sévices sexuels faits aux enfants, la responsabilité parentale, la condition d’être noire.

Bien que, avec l’aide de Jeri, elle ait tiré parti de sa peau foncée en la mettant en valeur, en la rendant séduisante, elle se rappelait un échange qu’elle avait eu avec Booker un jour. Comme elle se plaignait de sa mère, elle lui avait dit que Sweetness la détestait en raison de sa peau noire. « Ce n’est qu’une couleur, avait-il dit. Une caractéristique génétique : pas un défaut, pas une malédiction, pas une bénédiction ni un péché. »

J’ai souvent été regardée de travers à Dieppe (Haute-Normandie, France) quand je me retrouvais dans les bus. Je me demandais si ces gens n’avaient jamais vu de noirs. 

J’ai apprécié la narration poétique, très descriptive de l’auteur et ces références à la musique. J’ai apprécié l’originalité de la famille de Booker et sa relation avec cette femme dont la beauté éblouit.

Ai-je noté un bémol ? Hummm… l’intrigue un peu linéaire. Le style de l’auteure est assez soutenu. Il faut être très concentré pour ne pas être perdu.

Le titre original du roman est «God Help the Child ». Je trouve que le titre en français : Délivrances » a été bien choisi. Dans ce roman, il est question de plusieurs délivrances : délivrance du deuil, de l’injustice, de la colère, de la dépendance affective, du mensonge, de parents irresponsables, du passé accusateur.   

C’est un roman à lire quand on veut être délivrée de l’ennui. 🙂

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Editeur : CHRISTIAN BOURGOIS ÉDITEUR

Format : existe en broché, kindle

Nombre de pages : Broché, 198 pages

TraducteurChristine Laferrière

Dépôt légal : août 2015

lauteur

Toni Morrison (de son vrai nom Chloe Anthony Wofford) est une romancière américaine.
Née dans une famille ouvrière, Toni Morrison s’intéresse très tôt à la littérature et se passionne en particulier pour les œuvres de Jane Austen et Léon Tolstoï.
Elle reçoit le prix Nobel de littérature en 1993 pour l’ensemble de son œuvre. L’Académie suédoise voulait ainsi récompenser celle « qui, dans ses romans caractérisés par une force visionnaire et une grande puissance poétique, ressuscite un aspect essentiel de la réalité américaine ».

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Obsession

L’Attente fortement ressentie par le personnage de la nouvelle Obsession… – qui a inspiré le titre de ce recueil – est un leitmotiv partagé par plusieurs autres nouvelles. Dans Marie-Espoir, Comment choisir ? et Tic-tac, après maintes déceptions, la vie s’annonce  enfin prometteuse pour Marie, Sakhine et Aboua. Quant à la cupidité, véritable gangrène sociale, elle fait prendre des risques à Betty, Elisa et Aby, trois jeunes dames pourtant pleines de vie dans Les attaquantes, et même à Jacob pour qui l’argent semble plus précieux que sa santé dans Le matelas. Ainsi va la vie, entre déboires et rayonnements, vices et innocences…

Dans ce recueil de quinze nouvelles, des travers de notre société  comme l’inceste, le mariage forcé, l’escroquerie, côtoient des sentiments nobles tels que l’Amour et le Don de soi, pour montrer que l’Espoir est toujours et encore permis.

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En parcourant la quatrième de couverture, on peut penser que ce recueil est banal, qu’il vaut un autre livre et pourtant …

L’on ferait un «Reading–faux-pas » en sous-estimant la force de cette œuvre.

En parcourant mon blog, vous pourrez voir que j’ai lu plus d’une dizaine de recueil de nouvelles, si vous me demandez celui qui m’a le plus marquée,  je vous dirais : Obsession de Komara Constance Mariam.

J’ai l’habitude de lire des nouvelles avec des chutes brutales, inattendues, Komara Constance Mariam m’a fait découvrir des nouvelles aux belles ouvertures et forts goûts d’inachevé.

La majorité des nouvelles se termine avec une action en suspens, l’auteur donne la liberté au lecteur de trouver la fin qui lui convient.

La plume de l’auteur est simple, sans fioritures ce qui permet au lecteur de se projeter facilement dans les scènes décrites.

L’auteur ne veut pas ennuyer son lecteur et on le sent dans les moindres détails. Chaque héros de nouvelles a une profession différente ce qui nous permet de voyager dans des décors distincts : expert en développement durable, banquière, entrepreneur, professeur à domicile, policier…

Il en est de même pour les sujets évoqués : inceste, recherche d’une ascension sociale, cupidité, corruption, pauvreté, chômage, mariage consanguin…

 Quelles sont les nouvelles que j’ai préférées ?

Marie-Espoir

Je parie qu’avec un prénom pareil, vous m’imaginez pleine d’espoir ! Je vis sur une « Terre d’Espérance »  mais hélas, je ne peux être la mascotte de mon pays tant je suis le pessimisme personnifié !

L’emploi de Marie-Espoir est en-dessous de son niveau d’études, sa vie sentimentale est un désastre.  Désespérée de sa situation, elle se réfugie dans la prière et les veillées à l’église. Là-bas, elle recevra une prophétie qui désignera son mari, un homme auquel elle ne s’attendait pas et le lecteur non plus…

J’ai beaucoup aimé cette nouvelle pour la mise en exergue d’un fait que l’on rencontre souvent dans les églises évangéliques où des couples sont formés sur la base de prophéties divines. Révélation divine ou calcul sentimental effectué par les pasteurs ? Seul DIEU, le pasteur et le couple formé le savent … 😀

Cette nouvelle se termine sur un gros dilemme et j’avoue avoir élaboré plusieurs scénarii pour la suite de cette histoire.

J’y suis, j’y reste

J’y suis et j’y reste ! Vous les jeunes d’aujourd’hui vous êtes ingrats. Comment comprendre que vous voulez me faire quitter la maison qui vous a vu naître ? Dans cette maison, j’ai été pauvre. Dans cette même maison, j’ai eu ma fortune.

Un père de famille refuse de quitter sa maison située dans un bidonville et pourtant sa situation financière lui permet de le faire. Pour quelle raison est-il si attaché à cette maison ? La réponse est à la fin de cette nouvelle

J’ai bien aimé  le côté mystique de cette nouvelle qui fait 10 pages. Là encore, l’histoire s’achève sur un choix que doit opérer l’un des protagonistes de l’histoire et l’on ne peut en tant que lecteur s’empêcher de vouloir choisir pour lui.

Tic Tac parce que j’ai connu la période de chômage et toutes les interrogations qui en découlent.

Comment choisir ? Rester dans une vie de maîtresse frustrée d’un homme marié ou épouser un étranger et vivre une union longue distance avec son corollaire de contraintes, ou alors me mettre en couple avec un collègue avec tout ce que cela impliquera comme déconvenues professionnelles et racontars sur notre compte ?

A la place de l’héroïne, qu’auriez-vous fait ? Moi, je cherche encore … 😀

 

Et pourtant c’est lui. Un homme est accusé d’avoir volé le portefeuille d’un autre. L’accusatrice est formelle mais le portefeuille ne se retrouve pas sur l’accusé. Où se trouve-t-il donc ? Cette nouvelle s’étale sur 2 pages. J’ai beaucoup apprécié sa touche d’humour.

Veuf mais pas trop  Un homme perd sa femme. En plein deuil, il s’aperçoit que celle qu’il a épousé n’était pas vraiment sa femme… J’ai été agréablement surprise par la fin. Là encore, on ne peut s’empêcher de s’imaginer la suite des événements de l’histoire.

Fatalité qui dénonce les conséquences du mariage consanguin. L’histoire m’a beaucoup émue.

Quelques nouvelles ne m’ont pas séduite. Il s’agit de :

Renoncer.  Le récit d’un policier qui se laisse entrainer dans la corruption et décide d’y renoncer. La moralité est forte mais je n’ai pas été transportée émotionnellement.

Mes yeux ont vu. Un amoureux de la nature au point de voir en elle une femme… L’histoire se lit aisément mais elle ne m’a pas emportée.

Le matelas.  Un homme à l’apparence très pauvre et pourtant très riche. J’ai déjà entendu une histoire de ce genre avec le même début, le même corps et la même fin. Je m’attendais à une autre tournure de l’histoire, plus originale.

La grenouille du Marabout. Le début de la nouvelle ressemble à un conte. Je n’arrivais pas à entrer dans l’histoire. J’ai relu les premières pages à deux reprises.

Garba le Jouisseur veut officier comme marabout afin d’assouvir ses fantasmes démesurés. Il utilise donc un subterfuge pour arriver à ses fins. Son manège fait rire, la fin de l’histoire aussi mais je m’attendais à une autre tournure, à une fin plus explosive.

Je vous souhaite une très belle découverte de l’œuvre.

Quel recueil de nouvelles lu vous a marqué ?

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L’habit de l’âme

Vérane est mariée depuis dix ans, et vit dans le magnifique village de Murbach en Alsace. Son mari​, alcoolique notoire et ​violent lui offre une vie misérable. Mais depuis un an, elle​ voit un homme en cachette. Alors que Vérane s’apprête à mettre fin à ses jours, un drame survient et, le mari légitime ​meurt d’une façon mystérieuse. Vérane vit un cauchemar en prison où elle espère qu’un jour elle pourra aimer et être aimée encore. Elle a déjà presque tout perdu ​et attend son jugement…Comment croire à l’avenir et ne pas renoncer ?

L'habit de l'âme

L’écriture simple de l’auteur nous introduit sans heurt dans le village de Murbach puis dans la vie de Vérane, une trentenaire mariée et mère de quatre enfants. On découvre son idylle secrète avec Thibaut et la prison dans laquelle son mariage sans vie la maintient.

On découvre une femme complètement perdue, ne sachant quel chemin prendre :  choisir entre une vie d’amour et une vie de mensonges. Bien qu’elle n’aime plus ce mari qui la maltraite depuis des années, elle n’a toujours pas la force de lui faire du mal, a peur de briser sa vie plus qu’elle ne l’est déjà et de blesser à jamais le cœur de leurs enfants.

Écoute Thibaut, nous sommes dans un monde où des gens se tuent tous les jours pour des raisons religieuses, idéologiques, et j’en passe… L’amour,
c’est encore pire. Quand on le vit, on a l’impression de renaître. On voudrait en avoir suffisamment pour ne jamais en manquer, mais plus on court après lui, plus on ruine nos rêves, au point d’oublier qui l’on est. J’ai eu des enfants, mais ils ne sont pas nés de deux parents qui avaient décidé dans la joie de les concevoir. La première fois que je les ai tenus dans mes bras, j’ai eu du mal à ne pas les rejeter, car je savais que même s’ils ne vivaient que depuis quelques minutes, ils étaient déjà condamnés. En donnant la vie, on oblige à mourir. En vérité, la douleur, c’est la dette de l’homme.

Quand son amant choisit pour elle et décide de mettre un terme à leur relation, Vérane s’effondre, refuse de continuer à vivre dans ce monde qui n’est vraisemblablement pas le sien. Elle prépare silencieusement sa mort sans savoir que son mari prendrait sa place…

Vérane entre alors dans un tourbillon de tourments et nous emporte avec elle. On est ému par son arrestation, ses enfants qui lui sont brusquement arrachés sans qu’on ne lui dise à qui l’on les confiera. On a peur de la voir payer le prix pour un crime qu’elle n’a pas commis.

Attendre, mais sans compter les journées, les nuits, les minutes, les
secondes, pour ne pas devenir folle.

C’est pour se libérer de cette peur que l’on va jusqu’au bout du livre ;  on veut connaître le sort final de Vérane.

L’habit de l’âme est un récit agréable à lire. Sans fioritures, il se lit rapidement (j’ai lu les 307 pages du roman en 4 heures).

L’auteur veut détourner nos yeux de la fatalité et les fixer sur l’espoir et l’amour. La seconde chance et le nouveau départ sont toujours possibles. Cela se ressent fortement dans les lignes du récit.

J’ai apprécié le dénouement de l’histoire. En ces moments sombres que le monde connaît, c’est bénéfique d’avoir quelques moments de douceur romanesque.

Il me tarde de sentir l’odeur du bonheur, et je sais qu’il a en une, car je l’ai sentie quand je me suis enivré des fragrances de ton cou.

J’ai également apprécié le fait que l’auteur laisse une interrogation en suspens dans l’histoire. ( je ne vous dis pas laquelle pour garder intact votre suspense lors de votre lecture.) J’estime que le roman ne doit pas contenir toutes les solutions aux problèmes qu’il décrit. Il doit contenir une part d’inconnu.

Le récit va à l’essentiel, un peu trop à mon goût. J’aurais voulu que l’auteur aille plus en profondeur, qu’il y ait plus d’actions fortes, de force et de passion dans la relation de Vérane et Thibaut, plus de descriptions de l’univers carcéral…

Je vous souhaite une belle découverte de ce roman disponible sur  Amazon.

Vous pouvez retrouver l’actualité du livre et de son auteur  sur son site web et Facebook .

Grand merci à l’auteur Christophe de Sairas pour l’envoi de son oeuvre.