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TTL 121: 69 de Florent Houndjo

C’est l’heure du Throwback Thursday Livresque ! Cette semaine, le thème est : Un livre dont vous repoussez la lecture en lien avec la journée mondiale de la procrastination qui aura lieu demain.

Je me permets de déformer un peu le thème en parlant au passé : Un livre dont vous avez repoussé la lecture.

Le livre élu est 69, un roman lu l’an dernier dans le cadre de la présélection du Prix les Afriques 2021. J’ai repoussé la lecture de ce roman jusqu’au dernier moment parce que le résumé ne m’attirait pas du tout.

D’ailleurs, je n’arrivais pas à faire le lien entre le titre, l’image de la couverture et le résumé.

« … Un bourdonnement tellement puissant qu’il s’assimilait même à un vrombissement d’aéronef soviétique de la Seconde Guerre mondiale. On entendait des vrrrrrrrrr et des zrrrrrrrrrrrrrrrrr ! C’étaient des abeilles ! Une importante nuée d’abeilles.
La grande et épaisse armée d’abeilles se subdivisa en plusieurs bataillons. Lesquels foncèrent chacun, de façon chorégraphique, vers les amphithéâtres. Les essaims d’abeilles entrèrent dans les salles, dépassèrent et contournèrent tous les étudiants présents et, en une vitesse de lumière, atteignirent l’estrade où ils se déchargèrent sur les enseignants. C’était le sauve-qui-peut, la débandade ! Même les assistants des professeurs, n’ont pas cru devoir porter instantanément secours à leurs patrons qui gigotaient convulsivement sous l’armée des volatiles. L’instinct de survie étant plus fort que l’esprit de solidarité et d’assistance, ils n’ont alerté les secours qu’une fois à l’extérieur. C’est ainsi que nos enseignants furent évacués d’urgence. »
Les dessous et les déçus de la conquête du pouvoir. C’est, en un mot, le voyage que nous propose l’auteur au cœur de l’appareil sociopolitique qui dirige l’État en Afrique
.

Le chapitre 1 débute avec une jolie citation d’Hugo. Je m’attendais à ce que les mots suivants soient empreints de poésie. Hélas ! L’intertextualité est fortement présente dans le récit mais j’ai eu avec elle une relation à la « je t’aime moi non plus« . J’ai apprécié certaines références et allusions, il y en a d’autres dont je n’ai pas compris la raison d’être dans le récit.

Le personnage central du récit est Gros-Coeur, un quadragénaire, autrefois leader emblématique de la jeunesse. Il a fui la ville , se retrouve maintenant dans un bourg nommé Allada. Là, il médite sur la vie, sur l’humain. Répudié par la communauté de ce bourg qui le considère comme un clochard insolite, il se lie d’amitié à deux enfants Kamal et Jimmy puis à leur tante Fatou.

Avec cette jeune femme, il évoquera les fantômes de son passé.

Jeu politique en Afrique, boulimie du pouvoir, sort réservé aux veuves, nonnes pédophiles, telles sont les thématiques et sous-thématiques de ce roman.

L’ouvrage est accessible mais il aurait mérité d’être affiné, ciselé dans la construction de l’intrigue, des personnages, des chapitres. En parlant de chapitres, il y en a 28 dans le roman. Ils sont assez courts et certains d’entre eux auraient pu être regroupés afin d’apporter de la consistance au récit.

Je n’ai pas passé un moment agréable avec ce livre. J’ai recherché durant ma lecture la raison du choix de ce titre et je l’ai trouvée à la page 184

— Effectivement, la vie, c’est du 69. Les situations, les positions, les convictions et les actions sont circonstancielles et fluctuantes.

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Nouvelles du monde #11 : Pérou

Couverture Nouvelles du Pérou

L’Eldorado ou le pays de l’or a longtemps fait rêver les Européens. Peut-être le plus secret, en tout cas l’un des plus méconnus des pays d’Amérique du Sud, le Pérou actuel fut l’épicentre de la fascinante civilisation inca qui, du xiie au xvie siècle, se déploya dans la cordillère des Andes, avant d’être annexé par les conquistadors espagnols. Les six cuentos (nouvelles) de ce volume, tous traduits de l’espagnol, reflètent subtilement les singularités de ce monde andin. Dans ce pays de sangs mêlés, la grande majorité de la population des campagnes andine et amazonienne, des montagnes, de villes comme Cusco, est très nettement amérindienne. Par ailleurs, ce pays est marqué par la conscience intrinsèque d’un « avant » et d’un « après » la colonisation, conscience qui a inévitablement modelé une identité, complexe, pleine de contradictions, laquelle résulte du mélange de philosophies et de valeurs opposées. Le Pérou d’aujourd’hui – urbain, rural – est dans chacune des nouvelles de ce volume.

De la glace pour les martiens de Claudia Ulloa Donoso

Une mère s’apprête à recevoir sa fille et le fiancé de celle-ci qui est norvégien. La mère découvre via Internet le pays de son futur gendre. Elle est chagrinée par les différences de développement entre la Norvège et le Pérou. Une nouvelle qui m’a au moins permis de découvrir les mets péruviens.

Les rois de la forêt de Karina Pacheco Medrano

Une femme est la seule touriste dans un hôtel. Là elle revit son passé : son engagement pour la 1ère fois dans la selva profonde, ses voyages dans les lagunes amazoniennes vingt ans plus tôt, ses réunions avec les autochtones qui vivaient sur les terrains pétrolifères, les dénonciations des communautés relatives aux fuites et dérèglements causés par les entreprises pétrolifères et ce terrible jour où elle a dû être évacuée. Je ne suis pas sûre d’avoir saisi la chute du récit.

Ici-là-bas de Grecia Caceres

Un jeune homme qui tombe sous le charme d’une femme plus âgée que lui. Une histoire qui le hante. Une histoire captivante mais je suis restée sur ma faim.

De courageux garçons de Félix Terrones

Un groupe de garçons rêvent de pouvoir être écrivains à Paris mais ce rêve c’est leur ami Antonio qui va le vivre. Quand il revient des années plus tard, ils lui réservent un accueil triomphant mais l’Antonio Carneiro qu’ils avaient côtoyée durant leur jeunesse n’existe plus. Que lui est-il donc arrivé à Paris ?

On était nombreux à vouloir être écrivains, mais seule une poignée d’élus peuvent l’être vraiment, une race exceptionnelle à laquelle Antonio appartenait depuis toujours.

Une sympathique lecture même si elle me laisse avec une énigme non résolue sur la vie d’Antonio à Paris.

Les climats étranges de Carlos Yushimito

Le narrateur a 50 ans et il vit avec une jeune fille de 30 ans sa cadette et qui s’imagine être une autre personne ou en dehors de lui. Un récit bien étrange pour moi.

L’art ancien de la fauconnerie de Paul Baudry

De quoi ont pu mourir les pigeons dans la volière de l’Apra (l’Alliance Populaire Révolutionnaire Américaine) ? Sandro Sandoval, expert du ministère de la Santé préfère se concentrer sur la recherche des causes plutôt que sur les mauvais souvenirs de l’incident avec le faucon et son père qui accordait plus de temps à son ami, Víctor Raúl Haya de la Torre (fondateur de l’APRA) qu’à son fils. Une amitié ensorcelante, prioritaire qui a l’allure d’un sentiment amoureux.

Il n’y a pas que Don Gaetano Sandoval qui vouait une admiration exclusive au fondateur de l’Apra. Il y a également Roberto Amaya, vigile de la maison du peuple qui veille jalousement sur la mémoire du fondateur et semble-t-il sur ses dernières volontés. Une seule phrase m’est venue à l’esprit à la lecture du dernier paragraphe: tout excès nuit, la loyauté n’est pas une exception.

Dans le cœur d’un homme d’Etat, il n’y a jamais de place pour deux amours.

De ce recueil de nouvelles, j’en ressors avec une appréciation mitigée. J’ai découvert un peu Lima, l’histoire politique du pays, la selva mais je ressens pour 80% des nouvelles un sentiment d’inachevé. J’aurais voulu des histoires plus percutantes.

Grand merci à Youscribe qui m’a permis de lire ce recueil de nouvelles gratuitement sur sa plateforme. J’aurais été bien embêtée si je l’avais acheté.

J’ai six autres recueils de cette collection à découvrir via Youscribe. J’espère avoir des lectures aussi plaisantes que celles de Nouvelles du Soudan et de Taïwan.

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TTL 72 : Les Poisons de Katharz de Audrey Alwett

Qui dit jeudi, dit Throwback Thursday Livresque. Cette semaine, le thème est Happy Halloween.

Je ne fête pas Halloween par conviction spirituelle mais quand j’entends Halloween je pense immédiatement aux sorcières sur leur balai 

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Parmi les lectures d’août, figurait une sorcière et elle était l’un des personnages de ce roman.

Couverture Les Chroniques de la Terre d'Airain, tome 1 : Les Poisons de Katharz

À Katharz, la ville-prison où la Trisalliance déverse chaque année ses indésirables, la situation est intenable. Ténia Harsnik, la tyranne en place, est obsédée par un nombre, celui des habitants qui vivent entre ses murs. En aucun cas, il ne faut dépasser les cent mille, car alors CE qui dort sous la ville SE réveillerait. Si cela se produisait, rien ne pourrait L’arrêter, sauf peut-être Dame Carasse… Mais la sorcière la plus puissante de la Terre d’Airain, à ce qu’elle raconte, semble bien plus préoccupée par son bizarre apprenti que par le destin du monde. D’ailleurs, la ville ne compte que 99 500 habitants. Ce n’est pas comme si l’apocalypse était dans un mois… pas vrai ?

 

J’ai fait la connaissance de ce roman fantasy sur le blog de Lire à la folie. La fantasy ne fait pas partie de mes lectures habituelles mais j’aime sortir des sentiers battus de temps à autre. 

L’intrigue que laisse apercevoir la 4e de couverture a attisé ma curiosité. J’avais hâte de découvrir cette ville-prison, ce CE qui dort sous la ville et de lancer le compte à rebours. 

Les dirigeants des 3 royaumes Malicorne, Chaolie et Thalas ont vu, un jour, un gamin efflanqué frapper à leur porte pour leur proposer une idée : déposer le rebut de leur population en un même endroit à l’orée de leur frontière. Une ville-prison pour les gibiers de potence, les truands, les assassins, les voleurs, les sorciers hors-la-loi et les putes – en tout cas, les moches, parce que les jolies, ça peut toujours servir. On les enfermerait là pour à peu près toujours. Et les fautes des parents se paieraient sur les générations suivantes, car de toute façon la descendance des criminels n’était que de la mauvaise graine, et c’était plus simple de condamner avant même que de laisser naître.

Cette ville-prison s’appelle Katharz et est dirigée d’une main de fer par Ténia Harsnik, 22 ans. Elle veille à ce que la ville ne dépasse pas les cent mille habitants afin de ne pas réveiller CE. Pour ce faire, elle fait  exécuter  certaines personnes, en envoie d’autres en prison et surveille de près le nombre de naissance. C’est dramatique mais il y a toujours une once d’humour. 

Pour éviter le réveil de CE, Ténia pense pouvoir compte sur Dame Carasse, la sorcière. Une sorcière préoccupée par le recrutement d’un nouvel apprenti-sorcier. 

N’étant pas fan de fantasy de prime abord, j’ai beaucoup traîné dans ma lecture. Il m’a fallu du temps pour entrer entièrement dans l’univers.

J’ai apprécié les conspirations politiques, les jeux de pouvoir. L’univers de la fantasy est bien présent: magie, dragons et licornes sont au menu. 

L’auteure offre une palette de personnages qui apportent une touche de fraîcheur au récit. Dans ce récit, toutes les péripéties donnent matière à rire. J’ai apprécié ces scènes hilarantes pas très loin du burlesque mais j’ai trouvé certaines répliques et dialogues trop convenus.  

En conclusion : les poisons de Katharz est une sympathique lecture mais pas mémorable.

 

Et vous, quel livre avez-vous ou auriez-vous choisi pour ce thème ?

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TTL 54 : Les cigognes sont immortelles

Le jeudi c’est Throwback Thursday Livresque ! Le thème de cette semaine est : Animal

Une belle occasion pour vous parler à nouveau de Mémoires de porc-épic d’Alain Mabanckou mais une inspiration de dernière minute m’a poussé à interpréter le thème autrement. Pas un animal en tant que personnage principal du roman mais dans le titre. 

Le roman Les cigognes sont immortelles d’Alain Mabanckou lu en octobre dernier a été une évidence.

 

Couverture Les cigognes sont immortelles

Pointe-Noire, dans le quartier Voungou, la vie suit son cours. Autour de la parcelle familiale où il habite avec Maman Pauline et Papa Roger, le jeune collégien Michel a une réputation de rêveur. Mais les tracas du quotidien (argent égaré, retards et distractions, humeur variable des parents, mesquineries des voisins) vont bientôt être emportés par le vent de l’Histoire. En ce mois de mars 1977 qui devrait marquer l’arrivée de la petite saison des pluies, le camarade président Marien Ngouabi est brutalement assassiné à Brazzaville. Et cela ne sera pas sans conséquences pour le jeune Michel, qui fera alors, entre autres, l’apprentissage du mensonge.

 

Mon avis sur ce roman

Michel, notre narrateur principal n’est autre que le héros de Demain j’aurai vingt-ans du même auteur. Quel plaisir de retrouver ce petit Michel qui m’a fait retomber en enfance et qui a démontré à travers son récit combien l’amour, l’amitié et la famille sont si importants pour la construction d’une vie.

Dans les cigognes sont immortelles, nous le retrouvons quelques années plus tard. Michel est maintenant au collège et sa candeur est toujours intacte.

Le récit débute le samedi 19 mars 1977. Michel nous fait découvrir sa parcelle, ses voisins et leur mode de vie, la boutique de Mâ Moubobi, ses parents qui s’aiment et se chamaillent ainsi que son chien Mboua Mabé qui veut dire en lingala chien méchant. On s’installe sans forcer dans ce quartier Voungou.

L’ambiance paisible du quartier est contrariée par l’annonce de la mort du camarade président Marien Ngouabi. L’annonce ainsi que le décryptage des événements sont faits sur les radios et on voit comment l’information est traitée  et analysée différemment au niveau national et international. 

L’histoire politique du Congo rejaillit. Celles des pères de la décolonisation en Afrique à l’instar de Ruben Um Nyobè et des assassinats politiques dans le continent au début des années 60 également. J’ai apprécié ce retour dans le passé.

Il y a des temps morts voire creux tout au long du récit mais la lecture est agréable dans l’ensemble. Mabanckou arrive toujours à me faire passer un bon moment de lecture grâce à son humour fou

 

Symposium, c’est quoi ça encore ? Vraiment, toi Roger, tu as des mots que même les Blancs se demandent s’ils sont dans leur dictionnaire !

 

Eh bien, nous ça nous arrangeait car Pompidou c’est un nom que nous aimions bien, c’était comme le surnom d’un bébé gentil qui boit son biberon le soir et qui s’endort sans embêter ses parents jusqu’à sept heures du matin

 

Le journaliste avait expliqué que le mariage avec Clotilde Martin ne dérangeait pas les Congolais, c’était bien de montrer que nous n’étions pas des racistes, que nous pouvions épouser des Blanches de toutes catégories, et même accepter qu’elles soient nos mamans nationales alors que ce n’était pas demain que Tonton Pompidou allait quitter sa femme blanche et choisir une femme grosse de chez nous qui sera noire du matin au soir devant tous les Français qui vont crier : Mais c’est quoi ça ?

 

 

La citation à méditer : mais le malheur se cache toujours derrière la porte du bonheur.

 

Quel livre auriez-vous choisi ? Faites-moi sortir des sentiers battus ! 

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Rentrée littéraire chez Grasset: Rouge impératrice de Léonora Miano

Grâce à la plateforme Net Galley, je découvre des romans de la rentrée littéraire 2019.

Je remercie les éditions Grasset qui m’ont permis de découvrir en avant-première le dernier roman de Léonora Miano

Rouge impératrice

Auteure d’une dizaine de romans dont je n’ai lu jusqu’ici que la saison de l’ombre, cette brillante auteure camerounaise s’intéresse à son continent. Elle explore son passé, expose son présent, anticipe son futur.

Et si le monde tournait à l’envers ? Et si le monde n’était pas dominé par les Etats-Unis, l’Europe mais par l’Afrique, les Noirs ? Et si les dominants devenaient les dominés ?

Et si les immigrants devenaient ceux qui refusaient l’asile ?

Et si nous avions une nouvelle trempe de chefs d’état non dépendants de la Françafrique, assoiffés de justice, non cupides, pensant au bien-être et au développement de l’Afrique ?

Quel africain (e) de l’Afrique subsaharienne n’a pas rêvé du futur glorieux de l’Afrique ? D’une Afrique prospère, maîtresse de son destin, ne tendant plus la main ?

Léonora Miano donne une forme au rêve d’hier et d’aujourd’hui en usant d’une écriture dense et d’un registre soutenu. Elle crée un univers qui met en valeur l’Afrique. Des croyances animistes ancestrales aux programmes télévisés en passant par les mets et le style vestimentaire, les richesses culturelles des tribus et ethnies de l’Afrique sont célébrées.

 

Oubliez Wakanda, entrez à Katiopa !

 

Espace spacio-temporel ?

  • Katiopa, l’Afrique unifié à l’exception des pays nord-africains, se composant de 9 régions.
  • L’an 2124 selon le calendrier des Fulasi (français) et l’an 6361 pour les katiopiens.

 

Ilunga est chef de l’Etat et membre de l’Alliance, une sorte de société secrète. Cela fait cinq ans que l’Alliance est au pouvoir, cinq ans que le Katiopa unifié existe.

Ilunga est déterminé à réussir là où la fédération précédant le Katiopa unifié avait échoué. 

Il rencontre lors de ses sorties Boyadishi. Le prénom Boyadishi est forgé à partir de celui d’une reine des Icènes, guerrière rousse appelée Boadicée.

Ilunga est déjà marié à Seshamani, Boyadishi (Boya) a un amant mais l’amour qu’ils ressentent l’un pour l’autre n’est pas anodin. 

Dans ce couple qu’ils vont former, l’énergie et le spirituel sont mis en avant. Un aspect apprécié durant ma lecture car pour moi il y a d’abord union spirituelle avant une union charnelle. 

Entrer dans l’existence d’un être conférait des responsabilités. On n’y venait pas pour soi-même.

Ilunga et Boya montrent la force que procure l’union du masculin et du féminin.

Boya, enseignante-chercheuse à l’université est passionnée des sociétés marginales notamment les Fulasi. Descendants d’immigrés français qui avaient quitté leur pays au cours du XXIème siècle, s’estimant envahis par les migrants. Afin de préserver leur identité européenne, certains s’étaient dirigés vers le pré carré subsaharien où l’on parlait leur langue, où ils étaient encore révérés et où ils pouvaient vivre entre eux. Mais leur descendance ne jouit plus de son pouvoir d’antan : appauvrie et dépassée, elle s’est repliée sur son identité.

Ces Fulasi refusent d’incorporer les mœurs locales. Selon Ilunga et Igazi (responsable de la sécurité intérieure) leur comportement pouvait constituer une nuisance pour le  Katiopa nouveau qu’Ilunga devait ériger.

Ilunga pense soumettre le projet de leur expulsion au Conseil mais Boya fera son possible pour l’en dissuader. Elle veut qu’on leur tende la main, qu’on les considère comme Katiopiens. L’influence de Boya sur le chef de l’Etat dérange Igazi. Pour ce Katiopien conservateur, il faut écarter Boya avant qu’elle ne dissuade Ilunga…

 

Au-delà de l’image glorieuse de l’Afrique qu’il renvoie, ce roman dense expose ces questions au cœur des débats de la nation française qui embarrassent et confondent souvent les politiques : repli identitaire, pureté identitaire, l’intégration et l’assimilation à une communauté. Sans faux-fuyant, Léonora Miano les aborde avec adresse et bon sens.

 

Rouge Impératrice, un roman à lire et à faire lire en attendant patiemment une adaptation cinématographique.

 

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Le roman est disponible en librairie à compter de ce jour. Pour l’acheter en ligne, cliquez ICI

NB : Si le roman est écrit en français, la langue de nos personnages est écrite dans l’écho de plusieurs cultures et langues africaines diverses. Je vous conseille de lire le glossaire avant d’entamer votre lecture.

 

GM signature

 

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Throwback Thursday Livresque 36 avec Maurice Bandaman

 

Thème de cette semaine : Imaginaire

Les littératures de l’imaginaire ne sont pas mes lectures préférées. Je ne suis pas une experte alors avant d’écrire ce billet, j’ai vérifié via Wikipédia si le livre à présenter pouvait s’inscrire dans les littératures de l’imaginaire.

Voici la réponse de Wikipédia : Il est néanmoins aussi possible d’y inclure les contes et les mythes ainsi que, plus spécifiquement, les récits surréalistes et le réalisme magique

Je peux donc vous parler de L’Etat Z’héros ou la guerre des gaous de Maurice Bandaman

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Dans L’état z’héros ou la guerre des gaous, l’auteur retourne à son écriture première, celle du conte-romanesque qui l’a révélé au monde. Il retrouve son style ample et plein de fougue, son verbe loufoque, ses images percutantes, cette « voix unique » qui fait de lui un grand conteur moderne.
Avec ce guide roublard et singulier qui sait brouiller les pistes, le romancier nous conduit dans des mondes étonnants où réalisme et surréalisme se croisent, fusionnent, se décroisent… Sous cet écheveau, le lecteur se fait une idée de l’histoire agitée de la Côte d’Ivoire qui fut coincée dans les serres de la guerre…

 

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Le livre a l’aspect d’un conte mais également d’un roman. Il commence par un chant  d’Akèdèwa. Pauvre qu’il était, Dieu l’avait rendu immensément riche. Il abusa de son pouvoir, et la punition de Dieu fut sa déchéance extrême.

Il se retrouve auprès de Kanégnon dont il devient le bras droit lorsque celui-ci accède à la présidence de la République de Boubounie. Un pays imaginaire qui ressemble fortement à la Côte d’Ivoire.

Akèdèwa est décrit comme une personne mystique, un prêtre de sciences occultes qui a le don d’ubiquité.

Kanégnon est un homme étrange, un prototype de ‘Thieni Gbanani’. Sa mère l’a porté pendant 21 ans, et depuis le sein de sa mère, c’est un redouté opposant au pouvoir en place.

On imagine que lorsqu’il accédera au pouvoir, il ne reproduira pas les erreurs de son prédécesseur. Hélas, Kanégnon fait pire. C’est un assoiffé du pouvoir, prêt à tout pour le garder.

Kanégnon nous fait voir les pires sacrifices humains et les méandres du mystique. Il nous fait assister à des orgies, nous dégoûte de la politique.

J’ai trouvé le règne de Kanégnon long. Il a fini par m’ennuyer. La thématique abordée est intéressante mais j’avais hâte de quitter l’atmosphère lugubre du roman. 

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Le pouvoir peut-il s’exercer sans abus ? Est-il incompatible avec les valeurs morales ?

 

Quel livre auriez-vous choisi pour ce thème ? Faites-moi sortir des sentiers battus ! 

 

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La Maison aux esprits d’Isabel Allende

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Entre féerie et cauchemar la saga de la famille Trueba avec son chef Esteban, riche propriétaire parti de rien, tyran familial et sénateur musclé, sa femme Clara hypersensible et qui dialogue volontiers avec les esprits et une foule de personnages, enfants légitimes ou non, employés, paysans. Portrait d’un pays passé sans transition des traditions rurales à l’horreur des tyrannies modernes. Premier roman de la nièce de l’ancien président du Chili.

 

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Les personnages étant nombreux, il m’a fallu du temps pour les identifier. Mis à part ce fait, je suis entrée sans difficulté dans le récit. L’humour est présent dès les premières lignes. La petite Clara et son don de voyance apportent une touche magique à l’histoire.

Rosa, sa grande sœur a un fiancé : Esteban Trueba. Leur mariage n’aura malheureusement jamais lieu. Lorsque Rosa s’éteint, le jeune homme devient un féru du travail. Il devient un propriétaire terrien qui ne badine pas avec son autorité et se croit tout permis avec les femmes. Lorsque ses pas croisent ceux de Clara, on s’imagine qu’il va s’attendrir mais ce n’est pas le cas.

 

Esteban et Clara vont construire une famille que l’on va voir évoluer au fil des pages. Elle mène son petit bout de chemin jusqu’au jour où Esteban entre en politique. Capitaliste jusqu’au bout des ongles, il va lutter jusqu’à la limite du possible pour empêcher la montée du communisme.

La justice ! Est-ce que ce serait juste que tout le monde ait la même chose ? Les flemmards, la même chose que ceux qui triment ? Les abrutis, la même chose que les gens intelligents ? Ça n’existe même pas chez les bêtes ! Ça n’est pas une question de riches et de pauvres, mais de forts et de faibles. Je suis tout à fait d’accord pour que chacun se voie accorder les mêmes chances, mais ces types-là ne font aucun effort.

Cette belle saga familiale décrit les chamboulements d’une famille mais aussi de la nation chilienne. Il y a d’intenses moments d’amour, de passion dévorante, silencieuse. Il y a des pleurs, des drames, des abus, de la violence, de la souffrance. Je n’imaginais pas en débutant le livre qu’il aurait une fin si déchirante.

Les personnages tant principaux que secondaires sont attachants. Chacun a une personnalité qui lui est propre. Esteban Trueba a un humour mordant, on l’aime et on le déteste à la fois. Transito Soto m’a également fait rire avec sa coopérative de prostituées mâles et femelles. 

On passe tellement de temps avec ces personnages (le roman fait plus de 500 pages) qu’on a l’impression de quitter des personnes intimes en fin de roman.

J’ai apprécié ce voyage en Chili. L’écriture d’Isabel Allende est charmante, fluide, poétique.

Allez, une dernière citation tirée du livre pour se dire au revoir 😀

Notre Sainte Mère l’Eglise est de droite, mon fils, mais Jésus-Christ a toujours été de gauche.

 

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Love is Power ou quelque chose comme ça

Prenez deux vieilles femmes abandonnées à leur sort, un jeune homme dont l’unique ambition est d’être un arnaqueur du web, des enfants de 14 et 12 ans livrés à eux-mêmes, une mère ivrogne, un professeur qui a une relation extra-conjugale avec l’une de ses élèves, une épouse violentée par son mari dès qu’il endosse son uniforme de policier, un homme qui souffre de mauvaise haleine, des agents des forces de l’ordre corrompus, un couple qui se dispute l’amour de leur unique enfant, un cousin épris de sa petite cousine, un couple interracial qui s’aime sans engagement. Placez les au Nigéria en faisant une escale rapide à Nairobi. Donnez à ces hommes et femmes le temps de s’exprimer et vous obtiendrez Love is Power ou quelque chose comme ça.

Adrian Igoni Barrett fait une étude captivante des mœurs au Nigéria et nous montre les multiples facettes de ce pays. Le Nigéria et son instabilité politique des années 70, ses bandits de grand chemin, ses arnaqueurs, sa population en proie à la misère.

L’amour occupe une grande place dans ce recueil et est exposé avec ses multiples visages : amour interdit, possessif, exclusif. L’amour est interrogé, éprouvé.

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Le sexe est monnaie d’échange, moyen de pression ou plaisir tout simplement.

La plume d’Adrian Igoni Barrett a été une belle découverte. J’ai trouvé son écriture succulente. J’ai eu l’impression à chaque nouvelle de découvrir un auteur différent. Les nouvelles sont de longueur variée et chacune d’elles possède un style singulier.

Mes nouvelles préférées sont : Ce qui était arrivé de pire, le problème de ma bouche qui sent, Godspeed et Perpetua, une histoire d’allées et venues à Nairobi.

 

Ce qui était arrivé de pire

Veuve, Maa Bille se sent abandonnée par ses enfants qui vivent pour la plupart à l’étranger. Elle doit aller au CHU pour une énième opération des yeux mais il n’y a personne pour l’accompagner. 

Cette nouvelle plaisante aborde le “devoir” des enfants envers leurs parents. Des parents qui se sont pliés en quatre pour leurs enfants et qui attendent un peu le retour de l’ascenseur. Leurs enfants doivent-ils toujours être présents pour eux ? Doivent-ils leur rendre tout le bienfait ? J’ai bien aimé la réponse de Maa Bille

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Le problème de ma bouche qui sent

Une nouvelle pleine d’humour où un homme nous confie son problème de mauvaise haleine.

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Godspeed et Perpetua

Une différence d’âge entre un homme et une femme. Un mariage arrangé où va naître lentement l’amour. Puis l’enfant vient et l’amour devient exclusif. Père et fille s’installent dans un monde où la mère n’est pas conviée. Cette dernière se réfugie momentanément dans la religion. Des années s’écoulent et la politique entre en jeu.

Il y a du rire, des larmes dans cette nouvelle. La chute m’a émue.

 

Une histoire d’allées et venues à Nairobi

Un couple mixte où l’homme veut vivre un amour sans engagement, un amour au présent, n’a pas envie de se nourrir de promesses. J’ai apprécié l’interpellation de Leo dans ce magasin où des indiennes ont fait preuve de racisme. Les Indiens et leurs castes de merde !

Ces petites phrases sur l’amour m’ont fait sourire :

« L’amour, c’est revenir même quand tu ne peux pas »

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J’ai reçu ce livre lors du Colore ton swap. Pour en savoir plus, cliquez ICI

L’image mise en avant a été prise au restaurant POINT BARRE au Plateau (Abidjan), un restaurant cosy avec une décoration très littéraire. 

 

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Femmes, Houphouët-Boigny vous parle – Yao Norbert Etranny

La première de couverture n’est pas très représentative de la Côte d’Ivoire. Elle fait penser à un pays de la corne de l’Afrique. J’ignore pourquoi la maison d’édition a fait le choix de cette couverture. Les cheffes de village, personnages principaux du roman, sont issues de villages Akan. Montrer des femmes Akan aurait été pertinent selon moi mais bon concentrons-nous sur le contenu du roman. 

Résumé de l'oeuvre

Nan-nan Adjo est la cheffe d’un village de Côte-d’Ivoire. Désespérée de voir son pays sombrer dans la violence et le chaos, elle convainc les autres femmes cheffes d’entamer ensemble une réflexion approfondie sur une possible fin des hostilités. Le jour de la première réunion, on présente à Nan-nan et ses collègues des jumelles de 6 mois, a priori sans défense. Mais une chose incroyable arrive : les bébés s’expriment avec la voix du président Houphouët-Boigny ! Le défunt homme d’État veut aider les femmes dans leur entreprise, et les guide à travers les hautes sphères du pouvoir…

Flirtant habilement avec le fantastique, ce roman résolument contemporain fait un portrait mordant et réaliste de l’histoire sociale et politique ivoirienne.

 

l'Afrique écrit

Soyons francs, la Côte d’Ivoire a perdu son lustre d’antan. La belle Côte d’Ivoire a perdu sa noblesse, tout ce qu’on lui enviait : croissance économique, stabilité politique.

La faute aux chefs d’Etat faisant passer l’intérêt individuel avant l’intérêt collectif ? Nan-nan Adjo en est convaincue.

Avec le défunt président Houphouët-Boigny revenu du pays des morts, elle va convoquer les chefs d’état qui lui ont succédé par la voix des urnes et leur demander leur part de responsabilité dans le chaos politique, économique et social de la Côte d’Ivoire actuelle.

Chacun va rejeter la faute sur l’autre. L’auteur fait un portrait exact de ces chefs d’état; leur personnalité égoïste, rancunière transparaît.

Des solutions vont être proposées pour rétablir la cohésion du pays notamment le retrait de la scène politique de ces trois chefs d’Etat, la réduction des partis politiques à deux, l’arrêt des élections présidentielles et le pouvoir tournant des deux partis pour une durée de cinq ans chacun…

Des pistes pour une meilleure gouvernance. Le pays a un visage nouveau. Une vision optimiste de la politique ivoirienne que chaque ivoirien espère, attend. Sera-t-elle effective un jour ?

Un événement en fin de roman semble nous mettre en garde…

Lecture rapide et accessible au grand public, ce roman donne des pistes de réflexion pour repenser la politique en Côte d’Ivoire. Un livre à mettre entre les mains des amateurs de politique et pourquoi pas des trois chefs d’état et leurs partisans. 

 


 

J’ai acheté ce roman à la librairie de la Fondation Félix Houphouët-Boigny pour la recherche de la paix à Yamoussoukro. Si vous n’avez pas encore lu mon carnet de voyage, cliquez ICI

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Publié dans Arrêt sur une oeuvre

Le sarcophage des mutilés – Stephens Akplogan

Imaginez, vous êtes en recherche d’un compagnon avec qui passer un bon moment. Vous avez quelques soupirants en vue mais un proche vous propose de rencontrer X. Ce qu’on dit de lui vous plaît, vous décidez de le rencontrer. Vous allez au dating et là, catastrophe.

X a un style pédant, le temps passé avec lui est presqu’ennuyant. Il vous remet un cadeau à l’emballage complexe. Le déballer vous fait perdre du temps, de l’énergie, votre sourire, votre envie de découverte. 

C’est exactement ce que j’ai expérimenté en lisant Le sarcophage des mutilés de Stephens Akplogan.

 

Natan, un jeune homme doté de dons particuliers de voyance s’emporte contre Lissa, sa déesse et Lucius son ange gardien après avoir été un témoin inutile de la triste fin de l’écrivain Yambo Ouologuem.

Cette non assistance à âme en détresse qu’il brandit pour justifier sa fronde décida Lissa à accéder à sa requête. Le jeune prodige fut alors le rare stratège à qui Solstice Amlon doit son élection à la Présidence de son pays, malgré tous les crimes qui l’accablèrent. Mais, pour son second mandat, le sang de Natan sera demandé.

 

 

l'Afrique écrit

Le roman offre une vision de l’Afrique subsaharienne entre la fin des années 1970 et aujourd’hui. Il oscille entre le réel et l’imaginaire tant au niveau des personnages que des lieux. J’ai apprécié l’aspect surnaturel du récit, ce monde fait d’hommes et de dieux.

 

La vie de Yambo Oueloguem est narrée brièvement : la réception de son Prix Renaudot, l’accusation de plagiat, sa vie en retrait au Mali. On aurait pu se passer de cette brève biographie_avec tout le respect que j’ai pour cet écrivain_et se concentrer sur l’instabilité politique et les enjeux économiques après le soleil des indépendances en Afrique, thème principal du roman.

 

Bon nombre de manigances des politiciens et leurs fausses promesses sont exposées.

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L’auteur travestit les noms des politiciens béninois, j’ai eu un peu de mal au début mais j’ai fini par me retrouver. Le roman m’a permis d’en savoir plus sur les personnalités politiques, publiques du pays notamment l’actuel président et Parfaite, la jeune femme qui se prend pour Dieu et dit avoir été à l’origine et au centre de la rencontre entre le président Patrice Talon et le pape, le 18 mai 2018.

 

 

Le sarcophage des mutilés redonne de la valeur à l’esprit des ancêtres. Il propose une nouvelle orientation à la politique en Afrique.

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J’ai apprécié les dernières lignes du roman mais cette lecture a été une vraie souffrance au début.

Le niveau de langue est hyper soutenu, comme s’il était destiné aux dieux. Bonjour les maux de tête !

J’ai douté au début que ce roman en soit un, j’ai eu l’impression de lire un essai par moment ou une thèse. Les citations et références aux auteurs apparaissent dans le roman comme dans un mémoire de recherche.  

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Ce roman n’est pas du tout accessible pour moi malgré ses 152 pages. Il y a de la matière, le sujet est intéressant mais la forme utilisée dessert totalement l’objectif visé.

Pour vous faire votre propre idée, cliquez ICI

 

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