Il y a un monde entre le township d’Ocean View et la plage de Noordhoek, écrin de beauté
préservée dans la banlieue du Cap, sur laquelle le cadavre d’un homme est retrouvé un matin.
De la même façon, tout sépare Marge Labuschagne, l’ancienne psychologue criminelle qui a découvert le corps, de l’inspectrice farouchement indépendante Persy Jonas : couleur de la peau, âge, milieu social.
Et pourtant, leurs destins sont liés. Comme celui de Persy et du dangereux caïd d’Ocean
View, même s’ils ont pris des chemins différents.
Peu à peu, alors que les deux femmes sont contraintes de collaborer, les pièces du puzzle
s’assemblent, mêlant combines immobilières, corruption policière et crimes violents. Et
révélant toutes les vérités restées jusqu’ici endormies…
Au cœur de ce roman, rôdent les secrets enfouis sous les paysages idylliques de cette
péninsule du Cap et les violences faites aux métis déplacés sous l’apartheid. Michèle Rowe
nous invite à plonger avec elle dans cette Afrique du Sud magnifique et complexe, cette
nation arc-en-ciel.
La peur était un puissant moteur économique : les gens qui ont peur paieraient n’importe quoi pour se sentir à l’abri. Ils avaient soif de sécurité personnelle. Ils avaient soif de sécurité personnelle. Ils recherchaient aussi le secours des dieux et s’en remettaient à celui qui saurait les apaiser et leur assurer une protection spirituelle.
Je ne connais pas grand chose à la littérature sud-africaine. Les enfants du Cap m’a permis de combler cette lacune.
J’ai d’abord fait connaissance avec Persie, cette jeune métisse menue dévouée à son rôle d’agent de la loi. Elle essaie de faire régner l’ordre et la justice dans les banlieues du Cap comme elle prend grand soin de son grand-père à qui elle doit beaucoup, son prénom en premier. A travers sa vie, on voit combien il est difficile d’être métisse dans une société où les clivages raciaux persistent.
J’ai ensuite fait connaissance avec Marge Lebuschagne, psychologue criminelle blanche. Méfiante, elle a un grand penchant pour l’alcool et le désordre. Elle est à la limite de la dépression depuis son divorce.
Persy et Marge sont différentes et pourtant il va falloir qu’elles travaillent ensemble quand Marge Lebuschagne découvre le corps d’un homme sur la plage de Noordhoek.
Ce roman montre combien tout le monde se méfie de tout le monde, combien l’on préfère se contenter des préjugés plutôt que d’aller à la rencontre de l’autre et de le connaître réellement.
Un proverbe ivoirien dit : on ne montre pas son village avec la main gauche. Cela signifie qu’on ne dit pas du mal de soi-même ou qu’on ne montre que les bons côtés de son village ou pays. Michele Rowe n’en a que faire de ce proverbe.
Elle fait un portrait saisissant et réaliste de l’Afrique du Sud où les races ont encore du mal à former un moule homogène. Elle nous mène aux caïds, aux gangs, aux policiers corrompus. Elle étale la xénophobie des sud-africains, l’expropriation des plus pauvres, le mépris des Blancs, les mâles dominants et les femmes soumises, elle n’atténue en rien la violence qui règne.
Avec une écriture très descriptive, une intrigue qui tient bien la route, des personnages bien travaillés et crédibles comme Mhlabéni (le policier qui sait parfaitement arrondir ses fins de mois) et Sean Dollery, les belles surprises comme le passé en commun de Persy et Marge, Michele Rowe nous fait passer un agréable moment de lecture.
Je n’ai noté qu’un seul bémol : l’intrigue qui a été un peu longue à décoller.
Lisez-vous souvent des thriller sociaux ?
- Titre original : What Hidden Lies.
- Traduit de l’anglais par Esther Ménévis.
- Broché: 448 pages
- Editeur : ALBIN MICHEL (2 mars 2016)
- Collection : LITTERATURE GENERALE
Épouse du Kalahari Surfer, l’un des premiers musiciens blancs à s’opposer à l’apartheid, Michèle Rowe a suivi une brillante carrière de scénariste et de productrice. Elle est l’un des membres fondateurs de Free Film Makers, un collectif de cinéastes anti-apartheid. Cela fait des années qu’elle sonde la réalité sud-africaine dans ses documentaires qui ont remporté de nombreux prix, parmi lesquels un Oscar et un International Emmy. Avec Les Enfants du Cap, son premier roman, elle s’est d’emblée imposée parmi les grands en étant la première sud-africaine à gagner le Debut Dagger Award, décerné par la prestigieuse Crime Writers’ Association.