Publié dans Arrêt sur une oeuvre

Les transparents – Ondjaki

Les Transparents (Points) (French Edition): Ondjaki, Danielle ...

Je remplis lentement mais sûrement ma carte d’auteurs africains. A la recherche d’auteurs angolais, je suis tombée sur ce roman d’Ondjaki. Convaincue par la 4e de couverture, je l’ai inséré dans ma wishlist et obtenu dans le swap sur les merveilles.

 

Le récit s’ouvre sur un incendie. Un aveugle demande à son compagnon qui est un marchand de coquillages la couleur de ce feu qui monte du sol vers le ciel de Luanda.

Trois autres personnages sont également confrontés à cette gigantesque danse de jaunes qui se propage dans le ciel. L’homme s’appelle Odonato, sa femme Xilisbaba, son amie MariaComForça. 

 

Sans aucune indication temporelle, on se retrouve dans l’Immeuble qui avait sept étages et respirait comme un être vivant. Au 1er étage, une source d’eau douce, causée sans doute par une fuite intarissable, coule en abondance.

Au 4e étage, il y a Edù qui marche avec difficulté à cause d’une hernie gigantesque

Au 5e, vit le CamaradeMuet, complaisant et silencieux

Au 6e vivent Odonato et sa famille. Il a la nostalgie du Luanda d’autrefois, il a cessé de manger pour laisser la nourriture à ses enfants et est en train de devenir transparent. Son fils aîné survit grâce à des vols.

Il y a MariaComForça, qui vend du  poisson grillé, et son mari, Joaodevagar, le débrouillard, qui cherche à gagner de l’argent par tous les moyens possibles.

Et Paizinho, le jeune garçon qui cherche à la télévision sa mère dont il a été séparé à cause de la guerre.

L’Immeuble abrite aussi des journalistes, des chercheurs. Tout ce beau monde se croise, échange sur son quotidien, ses peines, ses espoirs, les cicatrices sociales laissées par la guerre. 

Des hommes, des femmes qui se réfugient dans l’Etre invisible parce qu’ils n’ont aucun recours dans le monde visible. 

–  Comment est-ce que vous tuez les microbes ?

–  en priant

– comment ?

– je prie, je demande à dieu qu’il les tue. ça ne sert à rien de faire bouillir l’eau, j’ai vu ça à la télé, nos microbes d’ici, ils aiment l’eau bouillante, l’eau de javel aussi, qui tue plus d’enfants que de microbes alors je prie

 

Une foi dont se servent les rapaces pour alimenter leurs poches…

A ne pas oublier, ce Facteur qui distribue ses lettres de protestation et réclame une mobylette à tous les représentants d’une autorité quelconque. 

Ces derniers semblent être issus d’un prototype unique : tous intéressés par les richesses naturelles du pays, ils se servent de leur autorité pour en tirer profit. Ils sont obnubilés par leur cupidité, l’auteur en usant de figures de style comme l’ironie décrit l’absurdité de leurs préoccupations. 

 

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extrait transparents

 

On ressent la satisfaction des puissants, la saudade des pauvres, ceux dont on ne tient pas compte et qui finissent par devenir transparents. 

L’écriture d’Ondjaki est exquise. J’ai mis deux semaines à lire cette oeuvre de 400 pages. L’imagination poétique et l’habileté narrative de l’auteur demandent un haut niveau d’attention. Ce roman a été un vrai exercice d’écriture pour la jeune écrivaine que je suis. 

 

Ce fut une lecture intéressante, une agréable découverte mais je suis restée sur ma faim. Certains faits ont manqué de développement selon moi notamment l’exploitation des eaux par l’un des puissants. 

 

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