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BYNF Challenge 12 – Premier rendez-vous amoureux

C’est l’heure du BYNF Challenge ! (En retard parce que j’étais en déplacement, toutes mes excuses)

Ce mois, la communauté a choisi comme thème : premier rendez-vous amoureux

 

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Je vous propose de lire la 2nde partie de La rêveuse.

 

La rêveuse – 2e partie

Je ressors du bureau de mon patron avec une montagne de choses à faire pour aujourd’hui. Qu’est-ce qu’il m’énerve celui-là ! J’ai parfois l’impression qu’il ne sait pas que ma journée de travail ne comporte que neuf heures.

Je fais une requête sur Access lorsque mon téléphone fixe sonne. C’est Evan, un contrôleur de gestion dont je suis secrètement amoureuse. Vous me comprendriez si vous aviez l’occasion de le voir. Sa taille avoisine les deux mètres, il est bronzé avec de grands yeux et une bouche… hum … une bouche gourmande qui invite aux excès…
Il m’invite à prendre un café, chose que je ne refuse jamais. Je peux ainsi partager un moment avec lui et m’enivrer de son doux parfum boisé.
Il me complimente sur ma tenue. Si tu pouvais aussi apprécier ma beauté. pensé-je
Nous discutons de choses et d’autres. Notre conversation a un air de déjà vu quand il me demande ce que je compte faire ce week-end. Oui, j’ai déjà rêvé de ce moment-là. Je lui ai dit que je le passerai avec des copines et lui m’a répondu qu’il irait à Assinie et que je pouvais me joindre à lui si je voulais. C’était peut-être une prémonition.

– Je vais le passer avec mes copines. On va sûrement aller regarder Aya de Yopougon. Et toi ?
– Ma copine nous a préparé un week-end surprise. J’ignore notre destination. me répond-il avec un large sourire.
– Le chanceux ! dis-je en riant jaune.

Je rejoins mon bureau, dépitée. Evan a une copine. Pourquoi ne me l’a-t-il pas dit ? Parce que je ne l’ai jamais demandé. Je n’ai donc pas de don de voyance. Je suis tout simplement une jeune femme de vingt-quatre ans qui vit sa vie amoureuse à travers ses rêves. Pfft !

Il est dix-huit heures quand je mets un point final à la dernière analyse qu’a demandé mon chef. Je l’appelle pour lui dire que j’ai terminé mais Monsieur n’est pas dans son bureau. Je réessaye cinq minutes plus tard sans obtenir de réponse. Ok ! Je lui fais un mail, scanne les états les plus urgents avant de mettre en veille en ordinateur. Je ne l’éteins que vendredi. C’est une recommandation du service informatique.

Je rejoins mon lit, le lieu où se déroule la partie la plus intéressante de ma vie : mes rêves.
Pourquoi ma vie n’est pas un rêve éveillé ? Pourquoi je ne peux avoir les mecs que je convoite ? Je ne suis pas miss Univers mais je ne suis pas moche non plus. J’ai de grosses qualités et de petits défauts. Pourquoi suis-je toujours célibataire ?
Je passe quelques coups de fil à mes copines avant de jeter un coup d’œil sur Facebook. Je ne m’y attarde pas. Eve essaie de me joindre.
– Coucou ma petite sœur chérie. Tu vas bien ?
– Ça peut aller.
– Ça ira mieux quand tu entendras ce que j’ai à te dire…
– Dis le moi vite.
– Ricky …
– Ne me dis pas que…
– Si !

Je me mets à sauter de joie.

– Il sera là, début septembre. Il va même faire un concert à Yamoussoukro.
– Oh là là ! Je suis trop contente. J’irai à tous ses concerts. Quel bonheur !
– Bon c’était la bonne nouvelle du jour. Je vais retrouver mon homme.
– La chance !
– Ton jour viendra.
– Tu me le dis depuis deux ans hein !
– Sois patiente, Lou.
– Ai-je le choix ? Allez, je ne te retiens pas davantage. Gros bisous. Je t’aime, Eve.
– Moi aussi « sista ».

Je vais sur la page Officiel de Ricky sur Facebook. D’habitude, c’est la première chose que je fais en me connectant mais j’ai complètement zappé aujourd’hui.
Je souris en voyant son statut qui date de six heures : « Bientôt en Côte d’Ivoire. Restez connectés. Votre Ricky »
Je suis trop contente. Mon Ricky sera là. La dernière fois que je l’ai vu c’était il y a trois ans. Il avait fait un concert guichet complet à Abidjan.
J’insère l’un de ses CD dans mon lecteur disque. Les notes de son dernier single emplissent la pièce. Je me laisse bercer par ces douces notes. Je nous imagine lui et moi en train de danser. Lentement, je rejoins le parvis des sommeils. C’est sûr, je rêverai encore de lui…

 

****

La salle est comble. songé-je en regardant autour de moi. J’attends impatiemment que le concert débute. Je veux revoir mon chanteur préféré. J’applaudis avec toute l’énergie qui m’anime quand il fait son entrée sur scène. Est-il magnifique ? Non. Le mot est trop faible pour le qualifier. J’approuve sa tenue vestimentaire : chemise cintrée blanche et pantalon noir. Elle lui donne une grâce féline. Je l’imagine sans elle. Il doit avoir au moins un tatouage, je dirais dans le bas du dos et de magnifiques tablettes de chocolat…

Je me mords la lèvre inférieure quand il saisit le micro et qu’il adresse un bonsoir chargé de sensualité à la salle. Cet homme parle à mon corps…
La salle est en effervescence. Tout le monde fredonne les airs qu’il entonne. A un moment de la soirée, il fait monter un piano à queue sur la scène.

– J’ai appris le piano rien que pour vous mesdames. J’espère que vous apprécierez mon interprétation.
– Joue seulement. On apprécie tout de toi. crie quelqu’une.

Des larmes voilent mon regard quand il exécute les premières notes. Il joue à la perfection.
Je suis parmi les premières à applaudir quand il finit son interprétation. Il s’incline pour nous saluer avant de reprendre le micro.

Il est une heure du mat quand vient l’instant de la tombola. La propriétaire du numéro sélectionné aura l’immense honneur de dîner avec Ricky.
Ricky ajoute : « ça sera peut-être un premier rendez-vous amoureux. »

Mes battements cardiaques s’accélèrent. Je le veux, ce tête-à-tête avec Ricky mais je sais que mon numéro ne sera jamais sélectionné. Je n’ai jamais de chance aux jeux de hasard.
Un silence religieux s’installe dans la salle. Une spectatrice est invitée à monter sur scène pour faire le choix. Je ferme les yeux. Je refuse de voir celle qui aura le bonheur de partager un moment avec Ricky.
– Et le numéro gagnant est le 157 !

J’ouvre automatiquement les yeux, jette un coup d’œil à mon billet. Louanne Kessié va dîner avec Ricky !
Je cours vers la scène pour présenter mon ticket. L’un des organisateurs me félicite après avoir vérifié mon ticket. Mes yeux croisent ceux de Ricky et mon cœur s’affole.
Je suis invitée à rejoindre l’équipe organisatrice à la fin du show. Je jubile en regagnant mon siège. Je suis une privilégiée. Eve n’en croira pas ses oreilles quand je le lui annoncerai.

****

Douche parfumée à la vanille, parfum capiteux, ongles manucurés, robe cloche choisie avec soin. L’image que me renvoie le miroir me sied à merveille. Je quitte la maison toute excitée. Le taxi dans lequel je me suis engouffré une demi-heure plus tôt stationne devant l’hôtel Pullman au Plateau.
Je me dirige vers le restaurant que l’on m’a indiqué. Le maître d’hôtel s’avance vers moi.

– Bonsoir. J’ai rendez-vous avec le chanteur Ricky. Je…
– Attendez un instant, s’il vous plaît.

Il s’éloigne de moi, revient quelques minutes plus tard avec l’un des organisateurs du concert. Ce dernier vérifie encore une fois mon ticket avant de me conduire vers la table. Mon rythme cardiaque s’accélère quand Ricky se lève pour me tirer ma chaise. Oh ! Mon Dieu ! Je ne rêve pas. Je vais vraiment dîner avec Ricky ! Il faudrait que je prenne des photos sinon Eve ne me croira pas.

– Vous allez bien ? 
– Oui. Merci de demander. Et vous ? 

Je baisse la tête. Je n’arrive pas à soutenir son regard.
– Je suis épuisé mais bon un dîner en charmante compagnie ne se refuse pas.
– Je… je suis très contente de pouvoir dîner avec vous. Je suis l’une de vos plus fidèles admiratrices.
– Vraiment ?

J’acquiesce d’un signe de tête. Il m’adresse un sourire plein de grâce. Je ne tarde pas à y répondre. Le serveur nous apporte deux coupes de champagne.

– A notre soirée…
– Louanne. Je m’appelle Louanne.
– A notre soirée, Louanne.
– A notre soirée, Ricky.
– Vous… je pense qu’on va passer au tutoiement… tu peux m’appeler Eric. C’est mon prénom…Ton petit-ami doit avoir totalement confiance en toi pour te laisser dîner avec moi.
– Je suis célibataire. répliqué-je avec un léger sourire

Il a l’air de ne pas me croire. Je le jure sur tout ce que j’ai de plus cher.

– Je suis peut-être faite pour rester célibataire
– Tu as tout ce qu’il faut pour ne pas le rester.
Quinze minutes plus tard, il sait en quoi consiste mon travail, ce qui me passionne (après lui, bien sûr). Il répond à mes questions avec une touche d’humour. Ce mec est en or !
– Tu es une femme rare, Louanne. J’ai rencontré des tas de femmes mais aucune d’elles n’a ce que tu as.
– Et qu’est-ce que j’ai ?

Il me fixe longuement sans rien dire. Ma gêne s’accentue lorsqu’il prend ma main dans la sienne. Il me demande si j’ai envie de danser. Oserais-je dire non ?
Je le suis, complètement hypnotisée. J’ai hâte de vivre enfin un rêve éveillé…

 

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BYNF Challenge 11 – Pièce favorites de notre penderie ou vanity

Ce mois, les BYNF ont choisi comme thème : Pièce favorites de notre penderie ou vanity

Ma muse n’a pas eu d’inspiration nouvelle, elle m’a donc proposé de partager un texte que j’ai écrit il y a quelques années.

La rêveuse – première partie 

« Un rêve est la moitié d’une réalité. » Joseph Joubert 

 

C’est la nuit du zouk au Palais de la culture de Treichville. Une myriade d’artistes se revendiquant de ce genre musical ont été invités mais je ne suis venue que pour un seul : Ricky, chanteur antillais d’une trentaine d’années. J’ai porté mon T-shirt favori : un T-shirt à son effigie.  
J’ai les étoiles plein les yeux quand il fait son entrée sur scène, entrée qui est saluée par un tonnerre d’applaudissements et des cris stridents de spectatrices. 

– Eh ben ! dis-je en regardant ma sœur. Nous n’étions pas les seules à l’attendre.
– Je t’assure. J’espère qu’il chantera plus de trois chansons. J’aimerais trop qu’il chante « Amour au Soleil »

Je n’ai pas de préférence. J’aime tout ce qu’il chante, tout ce qui vient de lui. Il pourrait juste chanter «La » ou chanter «la vie est belle». Il réussirait à me charmer. Que voulez-vous ? Il est doué, mon Ricky. 

Il entonne «Amour au Soleil» l’un des titres à succès de son premier album et ma sœur est aux anges. Ça lui rappelle des souvenirs, des souvenirs que je n’ai pas et que je n’aurai peut-être jamais. J’applaudis à n’en point finir quand il la finit. Ricky ! Ricky !
Il nous salue de sa voix suave avant d’entonner un autre air.

« Donne-moi tes peurs
Confie-moi tes craintes
Laisse-moi être ton ami 
Avant d’être ton amant

Dans ton esprit, je veux habiter
Dans ton cœur, je veux régner
Laisse-moi être ton amoureux
Avant d’être ton amant »

Je le regarde chanter, les yeux pleins d’admiration. Ah ! Ricky ! Cet homme est la sensualité faite chair. Comment un homme peut être aussi sensuel rien qu’en tenant un micro ?
Il exécute quelques pas de zouk. Je ferme les yeux et je m’imagine dans ses bras. Des frissons me parcourent l’échine. Des pensées interdites fourmillent dans mon esprit, pensées qui ne se matérialiseront jamais. Jamais un homme comme lui ne pourrait s’intéresser à moi. Il est si… et moi si…

Un nuage passe dans mes yeux quand il finit sa prestation. Zut ! Pourquoi les bonnes choses ont toujours une fin ? 
Je ne saurais dire quels artistes sont passés après Ricky. Je repassais en boucle sa prestation dans sa tête. L’on me comptera bientôt parmi ses fanatiques, je crois.

Le show terminé, ma sœur et moi regagnions la sortie quand je le vis passer. Il porte un jean moulant, une chemise bleu marine près du corps et des todds. Il est encore plus sexy que tout à l’heure. Mon Dieu ! Que faut-il faire de bien pour avoir un tel homme dans sa vie ?
Je demande à ma sœur de presser le pas. On pourrait peut-être avoir un autographe.
Il répond à l’une des questions du journaliste quand quelqu’une sortie de je ne sais où crie : 

– Voici mon mari ! 

Je la regarde, me mets à rire. Non mais elle se mire dans la lagune Ebrié ou quoi ? Elle pense vraiment qu’elle peut être la femme de Ricky ? Elle compte sur quoi ? Son postérieur plat et sa poitrine quasi inexistante ? La foi fait dire de ces choses aux gens !

– Va chercher ton mari ailleurs, ma chérie. Celui-là c’est mon mari. Criai-je
Je regrette mes mots quand je le vois se retourner. 

– A qui suis-je le mari ?

Silence radio. J’ai trop honte. J’aurais demandé à ma sœur qu’on s’en aille sur-le-champ si cela n’aurait pas été suspect. Qu’est-ce qui m’a pris de dire ça ? 

– C’est vous qui avez dit que je suis votre mari ? 

Il me le demande en souriant. Je réponds à son doux sourire avant de baisser la tête. Si la honte pouvait tuer. Mon cœur s’affole quand il nous demande de rester le temps que l’interview finisse. Que veut-il nous dire ? 
Je visualise divers scénarios quand je l’entends nous dire qu’il a fini. Nous nous retrouvons des minutes plus tard en train de bavarder dans sa loge, loge où les bouquets de fleur ne font point défaut.

– Ça ne doit pas être facile d’être une star. Vous devez en recevoir des centaines par jour.
– Effectivement. Heureusement qu’elles ignorent où j’habite. 

Il rit mais j’ai l’impression qu’il chante. Tout en lui est une douce mélodie.
Je sors de ma rêverie quand j’entends ma sœur lui dire que je suis l’une de ses plus grands fans et que c’est grâce à moi qu’elle l’a connu. Je lui jette un regard lourd de reproche. Elle va m’entendre celle-là ! Qu’est-ce qui lui a pris de dire ça ?!

– Ah bon ? Fan à quel point ? me demande-t-il un sourire en coin. 

Je commence à citer les shows qu’il a faits en Côte d’Ivoire et où j’étais allée juste pour le voir. Il sourit à nouveau, me dit qu’il est flatté de me compter parmi ses fans. 
Il est temps qu’on parte. Je réfléchis à comment le lui dire quand il m’embrasse.
Ce n’est pas un baiser chaste. Oh non ! Je peux vous l’assurer. C’est un vrai baiser hollywoodien. Je ferme les yeux, passe ma main sur sa joue et j’ai savouré. Ses lèvres sont douces. C’est affreusement boooon! 
J’ai la bouche entrouverte et les yeux toujours fermés quand il lâche mes lèvres des minutes plus tard.
Je suis encore sous le choc. Je… c’est… je viens d’embrasser Ricky ! 

– Je suis désolée. Je n’aurais pas dû.
– Eh ! C’est à moi de m’excuser. C’est moi qui t’ai embrassé. 

Il me sourit avant de dire : « pile au moment où je pensais à arrêter le boulot pour me chercher une femme, je tombe sur toi. C’est un signe du destin. Ça te dit qu’on essaye ? » 

J’ouvre grand les yeux. Une minute. Ricky veut se mettre en couple avec moi ? Je m’attrape la tête, crie comme si je venais d’apprendre que j’avais gagné au loto. Mais oui, j’ai gagné au loto ! C’est incroyable ! Je m’apprête à formuler un gros oui quand….

 

Dring ! Dring ! Dring !
J’ouvre les yeux. Putain ! Pourquoi ce réveil sonne toujours au mauvais moment ? Je le désactive avant de mettre mon coussin sur ma tête. Merde ! Je rêvais !

J’essaie de me rendormir pour le continuer juste deux minutes mais rien n’y fait. Je suis définitivement éveillée. Je rejoins la salle d’eau. J’en sors une demi-heure plus tard, élégamment vêtue d’un chemisier blanc et de ma jupe-crayon préférée en wax. Cette jupe-crayon, je l’adore !

Je repense à mon rêve en partant au boulot. Je suis contrôleuse interne dans une institution de transfert d’argent. Jaune et noir ça vous parle ? Non ? Tant pis !
Je passe mes doigts sur mes lèvres, revois Ricky en train de les embrasser délicatement. C’était si bon ! Heureusement que le rêve est permis. Je n’aurai jamais la chance de l’embrasser dans la réalité, jamais…

© Grâce Minlibé

Sur une échelle de 10, quelle note donneriez-vous à ce texte ? Avez-vous envie de connaître les coulisses de cette histoire ? Que les curieux lèvent la main ! 😀

L’image contient peut-être : une personne ou plus et texte

Di Hair Box, Amsa pour elles et Beebee from Cocody ont participé au challenge. Cliquez sur leurs noms pour accéder à leurs articles. 

La bise !

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Publié dans Histoires, Vingt-trois

L’accusé de réception

Grâce Minlibé

Vingt-trois – Chapitre 1

«C’est pas vrai! Je vais arriver en retard!» Dis-je en replaçant le moule dans le four. Je n’ai pas encore peigné ma tignasse et ce cake salé n’est pas encore cuit! C’était pourtant marqué sur la recette qu’il ne fallait que 45 minutes de cuisson!
Je parcours la fiche, vérifie que le thermostat est bien à 6. J’ai respecté la recette à la lettre, pourquoi ça met donc autant de temps à cuire?

Un brin d’inquiétude me fait plisser le front. Je ne peux pas rater ce gâteau. Meg compte sur moi, le cake est la seule entrée qu’elle propose pour son dîner d’anniversaire et s’il n’est pas bon et bah, elle est dans la merde! J’aurais dû m’y prendre un peu à l’avance mais bon je voulais un gâteau tout chaud, moi! Il ne me reste plus qu’à augmenter le thermostat, si le gâteau cuit en moins de 20 mn je me ferai un plaisir de faire une suggestion à marmiton.

Un quart d’heure plus tard, j’ai l’impression d’avoir gagné une épreuve décisive de MasterChef quand je porte un bout de gâteau à ma bouche. L’entrée de Meg est assurée!

J’enfile un chemisier blanc, une jupe bleu marine, j’hésite entre mettre des accessoires blancs, bleu marine ou d’une autre couleur. Je fais sortir une pièce de monnaie puis je me rends compte que ça ne sera pas facile de jouer à pile ou face puisque j’ai 3 choix. Allez, Karlise, dépêche! On est samedi et le tram il n’y en a pas toutes les 2 minutes.

En attendant l’arrivée du tram en direction de François Mitterand, je me fais une rapide mise en beauté, rien de bien raffiné, juste du gloss et une légère touche de fard à paupières. Oui, je peux faire mieux mais bon à quoi ça va servir? A rien, strictement à rien. Je ne me fais jamais remarquer par les hommes qui me plaisent même quand je ressemble à une barbie alors…

Je reçois un message de Meg au moment où le tram est à l’approche. Elle espère que je suis en route et que j’ai respecté le dress code. Bien sûr que je l’ai respecté, il ne me reste plus que le sac à dos pour ressembler à une studieuse lycéenne de Mamie Faitai. Pensé-je en soupirant.

Non mais quelle idée de faire habiller ses invités de cette manière? Oui c’est vrai, elle nous invite à célébrer le 7ème anniversaire de sa rencontre avec Dan, rencontre qui s’est effectuée à la fin d’une journée de cours (elle était au Lycée Mamie Faitai de Bingerville et lui au Lycée Garçons de Bingerville) mais je n’étais pas là quand ça s’est passé et les autres invités non plus. Pourquoi nous faire subir ces tenues?
Mon Dieu, qu’est-ce que ça aurait donné s’ils s’étaient rencontrés au primaire?

Je remue la tête et elle se fige quand mon regard croise le sien. Mes mains tremblent, mes lèvres suivent le mouvement.

Il est là… Me suit-il ou est-ce moi qui suis toujours à sa recherche?
Il a ce sourire empreint de tristesse et d’impuissance qu’il avait quand il a… Oh non! Je ne veux pas me rappeler. Je ne veux pas y penser, pas aujourd’hui…

Je me précipite hors du tram dès qu’il stationne à l’arrêt Michelet-Sciences, je m’éloigne de lui encore une fois…

Devant la porte de Meg, je respire pleinement avant de faire un pas du côté gauche. C’est un petit rituel que j’ai pour prendre de la distance, laisser ma peur sur le côté.

«Vis autrement Karlise, concentre-toi sur le présent.»

Meg vient m’ouvrir après ma deuxième sonnerie. Elle est toute rayonnante, elle a la joie singulière des grands événements, ceux qu’on n’attendait pas et qui ne se présentent à nous qu’une fois.

– Joyeux anniversaire de rencontre Maguéééééééé. Dis-je en lui tendant le gâteau
– Je te rappelle que j’ai un autre prénom et un surnom très raffiné aussi.
– Mais c’est Marguerite que je préfère. Il te va si bien! Dis-je un sourire ironique flottant sur les lèvres.
– Je prends le gâteau, toi, tu peux rentrer chez toi. Fait-elle faussement vexée.
– C’est vraiment une injustice qu’une jeune femme aussi belle que toi puisse s’appeler ainsi.
– Arrête sinon tu vas vraiment rentrer chez toi.

Je lui tire la langue. Ça y est, je suis ancrée bien le présent, je ne pense plus à ce qui s’est passé dans le tram. J’entre dans son coquet studio en esquissant quelques pas de danse. Au cas où on pourrait oublier, la musique diffusée par les enceintes nous rappelle le sentiment que nous célébrons ce soir.

J’ai à peine le temps de ranger ma veste dans sa penderie qu’elle me tire vers le coin cuisine. Je sors des verres lorsqu’on sonne à la porte.

– Ça doit être Dan et ses amis. Va ouvrir s’il te plaît. Je vais sortir quand ils seront installés. Je vais faire une entrée digne d’une reine. Tous les yeux seront braqués sur moi. Allez! Fais vite!

Marguerite Elsa Gnahoré et ses scénarii!! J’accueille avec le sourire Dan, Omar, Athara (la copine d’Omar), Aaron et Samuel.

Le regard plein de désir de Dan quand Meg nous rejoint fait naître une once de jalousie en moi. Meg n’est pas un top model, elle est habillée simplement mais elle a cette touche d’élégance que donne l’assurance d’être aimée…

Ils s’embrassent chastement puis Meg reproche à Samuel de n’avoir pas respecté le «dress code», il devait s’habiller en kaki ou en marron mais pas en bleu et blanc. Un rire général retentit dans la salle quand il nous dit que dans son lycée l’uniforme était unique: bleu blanc aussi bien pour les filles que pour les garçons.

Assise entre Athara et Aaron, je ne m’ennuie absolument pas. Leur simplicité et leur sens de l’humour parviendraient à dérider la femme la plus acariâtre.

Je trouvais un peu débile de fêter son anniversaire de rencontre avec ses amis mais j’avoue que ça me fait du bien d’être là. Je fais de nouvelles rencontres et mes papilles gustatives découvrent de nouvelles saveurs. Le poisson au four de Meg est exquis!
S’il n’y avait qu’elle et Dan, je me serais servie plus de 3 fois.

– On a fini de manger, on a un peu discuté. On peut quitter le registre de chanson très romantique et avoir des chansons plus dynamiques? Lance Omar
– On arrêtera la section romantique après une série de zouk! S’exclame Aaron. Karlise, j’ai décelé dans ta gestuelle une certaine aptitude pour ce type de danse. Tu veux bien qu’on danse ensemble?

Il me le dit avec une lueur assez déstabilisante dans le regard. Merde! J’espère qu’il ne va pas en profiter pour me susurrer des mots doux à l’oreille et m’annoncer avec entrain que je l’intéresse!

J’ai bien fait de ne pas me maquiller ce soir, j’aurais gaspillé fond de teint et mascara. Pfft!! Pourquoi je n’attire jamais les jolis mecs?

Bon, Aaron n’est pas moche mais ce n’est pas mon genre. Je n’ai pas à lever la tête pour croiser son regard et il est un peu trapu. Omar est mon genre mais il est très casé, Samuel n’est pas mal mais il a l’air d’être attiré par Léa, l’amie de fac de Meg qui nous a rejoints au début de l’apéritif.

Je m’imagine dans les bras de Fally Ipupa quand je débute mon premier slow avec Aaron, ça me permet de savourer le moment.
A la fin du 2ème slow, Dan, Omar et Samuel vont au balcon pour fumer, Meg discute avec les filles et moi, je suis avec Aaron qui s’intéresse de plus en plus à ma vie.
Pitié! On est là pour un anniversaire de rencontre pas pour préparer un futur anniversaire de rencontre.

La fatigue se lit sur les visages aux environs de trois heures, il n’y a plus de tram à cette heure-ci alors Aaron est chargé de raccompagner Léa et Samuel de me raccompagner. Aaron est un peu déçu mais ce n’est pas de ma faute si je suis plus sur le chemin de Samuel que sur le sien.

Avant de partir, je remets un petit présent à Meg et le juron qu’elle me lance n’est pas très décent à décrire.
– Tu veux me faire culpabiliser, c’est ça? Dit-elle en regardant la première de couverture du livre: 10 raisons d’être chaste jusqu’au mariage
– Non, je veux juste te remettre sur le droit chemin. Il n’est jamais trop tard pour bien faire.
– Tu es une vraie tarée.
– Mais tu m’aimes comme ça.

Elle me sourit avant de me prendre dans ses bras. Je lui fais un gros bisou avant de lui dire de prendre bien soin d’elle et de sa relation avec Dan.

Samuel et moi rejoignons sa voiture en silence. Un silence qui se prolonge dans l’habitacle. Nous suivons la route du tram 2 en direction du nord. Il a les yeux fixés sur la route et moi aussi. Je sursaute presque quand il me demande si je suis à l’école centrale comme Meg.

– Non, j’ai fait la fac de droit et je suis en stage de fin d’études dans un cabinet de recrutement.
– Elle est courageuse, Meg. Je n’aurais jamais pensé à faire un doctorat.
– Moi non plus.
– Et vous vous connaissez comment?

Pourquoi je souris? Parce que ça me fait plaisir qu’il engage la discussion! Je lui raconte donc que Meg était un peu comme ma grande sœur à l’internat au Lycée mamie faitai, qu’elle m’a encouragée à poursuivre mes études supérieures en France et qu’elle a été comme ma tutrice dans cette ville où je ne connaissais qu’elle.

Au fil de notre discussion, j’apprends qu’il réside à Rouen, est à Nantes et précisément à Carquefou en visite à un oncle et repart demain dans l’après-midi.

– Voilà, la demoiselle est bien arrivée.
– Merci beaucoup. Dis-je en lui adressant un sourire timide.
– De rien. Enchanté de t’avoir rencontrée.
– Pareil. Rentre bien. Dis-je en ouvrant la portière.

Il attend que je referme la porte de ma résidence avant de démarrer.

***

Deux semaines s’écoulent après le dîner. Un soir, en rentrant du stage, je découvre un avis de passage du facteur. J’ai reçu un recommandé avec avis de réception. Vu l’heure d’ouverture de la poste, je ne pourrai le retirer qu’à la pause de midi.

Le lendemain à midi et quart, je tiens une lettre dans mes mains qui a pour expéditeur un certain Sekongo Tiefigué. Je l’ouvre sans tarder et j’éclate d’un rire nerveux après lecture.

“Dans la vie, tout est signe.”
“Quand on veut une chose, tout l’Univers conspire à nous permettre de réaliser notre rêve.”
“Personne ne peut fuir son cœur. C’est pourquoi il vaut mieux écouter ce qu’il dit.”
Karlise Tié, est-ce que tu veux m’épouser?

Je regarde autour de moi histoire de repérer la caméra cachée, quelques clients entrent dans la Poste, me regardent bizarrement mais je n’en ai cure. Je cherche cette foutue caméra, c’est sûr et certain que c’est un traquenard.

Je commence à avoir mal au cou à force de promener mon regard à la recherche de cette foutue caméra. Non mais c’est qui ce débile qui ose me faire une farce pareille?