Publié dans Arrêt sur une oeuvre

Un monstre est là, derrière la porte – Gaëlle Bélem

Couverture Un monstre est là, derrière la porte

Tout commença un soir de 1981 lorsque dans la ville de Sainte Marie, au Nord de l’île, deux jeunes gens eurent le malheur de se rencontrer. Tandis qu’au-dehors la fête battait son plein, à l’arrière d’un restaurant un cuisinier retirait sa veste et la toque blanche qu’il portait depuis le matin.

Les Dessaintes forment l’une des familles les plus célèbres de La Réunion. Ils sont ambitieux, courageux et un brin fantaisistes. Mais, de l’avis du voisinage, des psychiatres et de la police, ils sont juste cinglés. Tout aussi barjos qu’ils soient, ils mettent au monde une fille. Une petite teigne qui compte bien devenir quelqu’un. C’est cette histoire familiale poignante au cœur de La Réunion des années 1980 qui est ici racontée.

La lectrice, le lecteur y trouveront du rythme, un ton vif, décalé, et, surtout, un humour décapant. Ils sont priés d’ouvrir la porte pour voir bondir le monstre. Des surprises, sans nul regret !

— C’est comme ça, un point c’est tout !
Alors que les parents se perdent d’ordinaire en circonlocutions pour expliquer à leur progéniture les grands mystères de la vie et le pourquoi du comment, les Dessaintes ont toujours fait preuve d’une incomparable avarice en matière d’explication et d’argumentation rationnelle.
Bien sûr, ils attachaient une certaine importance au fait de nourrir, habiller et coiffer l’unique enfant qu’ils avaient mis au monde, mais jamais, absolument jamais, ils ne forcèrent le zèle jusqu’à l’instruire, pire, l’éduquer.

Cet unique enfant est la narratrice. Elle dresse le portrait de parents aux comportements très étranges, à la limite de la folie.

Bref, mes parents à qui le hasard donna de surcroît ce nom de Dessaintes étaient, sans le savoir, d’horribles versions créoles d’un laconique Bartleby accouplé à ce cinglé de Lovecraft ! Et ils étaient animés d’une seule et abjecte conviction : que la meilleure façon d’élever des enfants était de leur clouer le bec en les terrorisant ! Ils n’expliquaient donc pas, ils épouvantaient.

La narratrice se réfugie dans ses lectures et trouve sa vocation à sept ans: elle veut devenir écrivain.

Dorénavant, j’exige qu’on m’appelle Ratus, au grand dam des Dessaintes ! Et je commets un crime qu’aucun d’entre eux n’aurait imaginé : je lis. Pire ! Cela me plaît.
Absolument. À un point tel que je trouve comment faire vraiment mieux que ces canailles : je vais lire et inventer des histoires pour les mettre dans des livres. Je vais outrepasser mon rang, ma condition, et être là où l’on ne m’attend plus. Alta alatis patent ! a hurlé dame Bélina. Mais, je n’ai pas compris son baragouin de maîtresse d’école. Dans ma tête à moi, résonna un vigoureux « à l’attaque » et je me mis effectivement à attaquer.
Voilà comment j’ai décidé à sept ans de devenir écrivain, sans savoir qu’ils étaient tous suicidaires, névrosés, mégalomanes et alcooliques.

Elle s’accroche à la lecture, au savoir, à l’école. On lui prédit un échec retentissant car les Dessaintes n’ont jamais réussi, ils vivent dans la misère, meurent incultes lui dit-on mais elle s’accroche.

Les désastres familiaux s’enchaînent, s’accumulent : chômage, alcoolisme, bagarres, disparition du père, vols, viols. Les Dessaintes semblent voués au malheur, aux vies déchirées par la violence.

A travers ses personnages, Gaelle Bélem évoque les problèmes socio-économiques de l’île dans les années 80. Un monstre est là, derrière la porte est une longue prose, aux dialogues rares et avec de jolies tournures de phrase. Mais les tableaux sombres décrits de l’île m’ont perturbée. Plusieurs fois au cours de ma lecture, j’ai perdu le fil. L’humour intervient par moment pour apporter un peu plus de légèreté au récit mais je suis ressortie de ce roman comme on quitte un film plein de noirceur.

Ce roman est un peu trop condensé à mon goût. Il aurait été judicieux à mon sens d’en faire une fresque familiale où on aurait une vue à 360° des Dessaintes. Aborder le « dedans » de cette famille sous l’angle unique de la narratrice ne m’a pas convaincue…

 

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Auteur :

En décembre 2014, j’ai publié mon recueil de poèmes «Chimères de verre» aux Editions Edilivre. En 2015, finaliste au prix Littérature et musique 2015 organisé par les éditions Souffle Court, je deviens co-auteure du recueil de nouvelles «Une nuit avec Baker » En 2017, mon 1er roman "Tristesse au paradis" voit le jour aux éditions Vallesse et me permet d'avoir plusieurs prix dont le Prix Horizon 2018. Je lis, j'écris et je n'oublie pas de vivre !!!

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