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Confessions amoureuses – Giovanni Mélèdje

Le samedi 4 mars dernier, j’étais à la dédicace du 5e livre de l’auteur ivoirien Giovanni Mélèdje: un recueil de nouvelles.

J’avais mis une pause à la lecture de recueil de nouvelles mais je ne pouvais refuser l’honorable invitation qui m’avait été faite.

La couverture du livre montre une jeune femme vêtue de blanc, le visage baissé. Est-ce l’illustration de Sœur Marie-Paule, héroïne de la 1ère nouvelle ?

J’achète rarement mes livres en fonction de la 1ère de couverture, la couverture de ce livre ne m’aurait pas poussée à la dérogation de cette règle.

Le titre du livre reprend bien l’idée générale du livre. Confessions amoureuses c’est 10 confessions d’amour. Mais le titre n’est pas inédit. En faisant une recherche sur le net, j’ai retrouvé au moins 2 œuvres avec ce titre.

Parlons maintenant du fond.

Commençons par Sœur Marie-Paule, consacrée au Seigneur depuis vingt ans mais brûlante d’amour pour Doudou. Comment se sont-ils rencontrés ? La nouvelle ne révèle aucune information à ce sujet. Elle est focus sur le pas que Sœur Marie-Paule franchit et qui aura des conséquences physiques….

Amour rime avec ingratitude. Fat l’apprend à ses dépens dans la 2e nouvelle. Elle parvint à faire venir son chéri en France mais l’amour devient vite distant.

L’amour aux collets, c’est la confession amoureuse de l’activiste au caractère bien trempé Dipri et le journaliste Roro. Entre eux, tout a commencé par une violente dispute pendant laquelle Dipri n’a pas hésité à prendre Roro par les collets. Depuis ce jour, Roro ne cessera de penser à Dipri. A-t-il un penchant masochiste ?

La nouvelle « si tu m’aimes » est celle qui m’a arraché un rire. Ariel est le copain de Sido, l’une des plus belles filles du campus. Il l’aime à mourir. Mais la sublime Sido semble l’aimer à temps partiel. Elle lui demandera de poser un acte dangereux par amour pour elle. L’amour rend-il bête ?

La 5e nouvelle est un échange de mails entre deux ex. L’homme a mal digéré la rupture après avoir œuvré pour la réussite de sa belle. Dans le mail qu’il lui adresse, il lui souhaite tous les malheurs du monde.

Un amour de jeunesse peut-il résister à l’aura et au pouvoir d’un ministre ? Pierre l’expérimente malheureusement dans la 6e nouvelle.

Pour vous, c’est quoi une trahison fatale ? Pour Odile, c’est sa meilleure amie qui devient sa rivale.

Dans la 8e nouvelle, un éminent professeur de psychologie humaine est un cocu !

Jean est un fonctionnaire modèle, un époux modèle, enfin presque. Quand Doriane entre dans sa vie au cours d’une soirée, il fait d’elle sa maîtresse. Mais la jeune femme est déjà l’amante d’un autre, un homme très proche de Jean.

Dans la dernière nouvelle, un professeur fait la cour à l’une de ses étudiantes pendant de longues années. Une fois marié avec elle, il court vers d’autres. L’aime-t-il vraiment?

Je découvre la plume de Giovanni Mélèdje. Ses œuvres si je m’en tiens à ce qui est dit dans l’avant-propos du livre tournent autour de l’orbite romantique. Activiste politique, il évoque également la gouvernance dans ses nouvelles.

Globalement, j’ai apprécié ma lecture même si j’ai trouvé certaines nouvelles trop rapides. Il m’a aussi manqué de l’originalité dans le fond. En effet, les intrigues ne sont pas inédites. Une sœur qui rompt ses vœux, une jeune femme qui sort avec le père et le fils, une femme qui sort avec le copain de sa meilleure amie c’est du déjà-vu en littérature comme au cinéma.

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Le football au Brésil

Le Brésil aime le football passionnément. Famille, amitié, amour, joie, tristesse : le ballon est présent dans tous les moments de la vie. Onze auteurs brésiliens contemporains parmi les plus talentueux s’en inspirent.
Onze contes, qui parlent d’enfants, d’adultes, d’hommes, de femmes ; qui prennent une tournure nostalgique, adoptent un ton ironique, parfois triste … tous plus divers les uns que les autres, avec un point commun : le ballon brésilien.

Vocation d’attaquant – Claudia Tajes

Un brésilien n’est pas un homme s’il n’aime pas le football, et vice versa.

Le narrateur n’aime pas le football mais il est attaquant dans la vraie vie: il s’occupe de femmes délaissées par leurs hommes à cause du foot.

Mon avis ? Une sympathique introduction au recueil.

Liberté, égalité, fraternité – Mario Feijo

Tous les hommes naissent égaux puis ils grandissent, certains préfèrent jouer en attaque, d’autres en défense, et le milieu de terrain reste pour les laborieux.

Un homme de 45 ans qui a la nostalgie de ces années où il jouait au foot sur les terrains vagues.

L’importance relative des choses -Luis Fernando Verissimo

Le football du samedi dans la maison de campagne de Magalhaes avait commencé comme une plaisanterie, une manière de s’ouvrir l’appétit avant de déjeuner. Très vite, les matchs prennent de l’ampleur et détruisent les couples.

Cette nouvelle m’a bien fait rire.

Faute – Toni Marques

Un enfant raconte ses vacances à sa maîtresse: au programme, le copain de sa mère, son père qui est footballeur professionnel, le match de football qu’il a joué avec des enfants sur la plage et sa mère qui se trouve grosse.

Une nouvelle dont je n’en ai rien tiré.

Pochette surprise – Rodrigo Ciriaco

Un joueur pas trop mauvais est décisif lors d’un match.

Déraison – Flavio Carneiro

La nouvelle évoque le journal de Canal 100, journal diffusé avant les séances de cinéma. Elle met en exergue la passion de ces hommes pour le football est la même peu importe si le match date d’hier ou d’il y a vingt ans.

Mon avis ? J’ai eu un peu de mal avec la construction de la nouvelle.

Défaite – Joao Carrascoza

Le narrateur évoque ce que représente le football pour lui. Il se rappelle des moments passés avec son père. C’est lui qui lui a appris à aimer le football.

Mon avis? Une relation père-fils touchante.

Une question de principes – Cristovao Tezza

Un homme reconnaît un ancien joueur. Un joueur qui a brisé son amour de jeunesse. Lors d’un match où il officie en tant qu’arbitre, il décide de se venger. Tout peut se régler sur un terrain de football 😀

Bonheur suprême – Luiz Ruffato

Personne ne voulait de lui même pour les matchs amicaux, il va réussir à créer l’exploit: créer l’hymne de l’équipe de football.

Passion – Carola Saavedra

Un homme veut se faire tatouer l’insigne de son club ?

La nouvelle la plus courte du recueil et que je n’ai malheureusement pas bien saisie. 😀

Le fils noir de Dieu – Rogerio Pereira

Une gloire du football aujourd’hui affaiblie par la maladie. Le narrateur qui admirait la star étant enfant doit admettre que ce joueur de football n’est pas immortel.

Un jour, un maillot – Tatiana Levy

1990 – 1991 – 2009

3 années importantes dans la vie de Francisco. La 1ère année, il fait la rencontre d’un homme, habile au football qui va lui promettre des maillots du Barça. La 2e année, Francisco attend désespérément ces maillots quitte à faire fi de sa dulcinée et de son fils.

La 3e année, Francisco retrouve son fils en regardant un match de football. Une nouvelle touchante.

Bienvenue au Brésil ! A travers ce recueil de 12 nouvelles, vous assisterez à 11 matchs et une prolongation. Chaque histoire évoque la passion du football et montre combien le ballon rond est omniprésent dans la vie des hommes au Brésil.

J’ai globalement apprécié ce voyage autour du ballon rond.

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Huit monologues de femmes-Barzou Abdourazzoqov

« Creusez-vous un peu la tête, un peu de fantaisie que diable, rajustez-vous. Et n’ayez peur de rien. Croyez en vous. Vous conquerrez le monde. Et alors on verra qui aura la peau de qui… »

Huit femmes entrent en scène. Avec beaucoup de verve et d’humour, malgré la vie qui ne les a pas ménagées. Elles viennent tour à tour raconter leur histoire – et se donner en exemple plus qu’en spectacle. Car elles n’ont, à vrai dire, rien perdu de cet espoir qui, entre accès de rage et jubilation, leur prête une liberté de ton au pouvoir salvateur.

Les monologues ont l’habitude de m’ennuyer mais ces 8 monologues de femmes sont une exception.

Huit femmes. Qui sont-elles ? Des anonymes. Des mères, des épouses qui s’épanchent. Un mari qui s’évapore dans la nature, un mari délaissé qui vous cocufie, un mari qu’on aimerait tromper et qui peut nous prendre en flagrant délit, des malheurs qui s’enchaînent, une fille qui a disparu ou encore s’amouracher d’un mioche, ça ne vous ferait pas monologuer, vous ?

J’ai ri avec ces femmes, j’ai aussi pleuré avec elles car deux des récits de vie sont émouvants.

Le troisième monologue est mon préféré. J’ai beaucoup apprécié cette femme résiliente face aux vicissitudes de la vie. J’ai d’ailleurs souligné l’une de ses phrases :

Car le malheur, ça ne dure pas, tout comme la joie, du reste. Ce qui demeure, c’est la conscience de soi, la patience, la foi peut-être. Mes chères amies, je connais le sort de beaucoup d’entre vous, je le connais mieux que personne. Mais je vous le redis encore une fois, le salut est dans la Foi, dans l’Espérance, dans l’Amour.

Ce recueil se lit très vite, il ne s’étale que sur 80 pages. Bien à insérer entre des pavés. Pour ma part, ça a été une belle découverte.

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Nouvelles du monde #15: Singapour

Singapour, en Occident, évoque d’abord les riches heures de l’époque coloniale, puis l’insolent succès, depuis les années 1960, d’une place financière et commerciale devenue incontournable. En deux générations, l’indépendance acquise en 1965 sous l’impulsion de Lee Kuan Yew, a profondément transformé l’identité du « Gibraltar d’Extrême-Orient ». Le melting pot singapourien (Européens, Chinois, Malais et Indiens), ayant en partage la langue anglaise et sa culture, ne pouvait pas ne pas en venir au « storytelling ».

Car cette cité-Etat est riche d’histoires individuelles. Quand on pense Singapour et littérature d’hier, l’image d’Hemingway, sirotant un Singapore Sling au bar de l’hôtel Raffles sous les pales des ventilateurs, s’impose. Mais si l’on pense Singapour et littérature d’aujourd’hui, pour mieux la comprendre, alors il faut lire les auteurs de ce recueil, représentants d’une culture mosaïque en plein devenir.

Six nouvelles écrites par trois hommes et trois femmes. Trois nouvelles qui ont réellement été captivantes.

L’homme qui avait peur des DAB par Wena Poon

Chang vit avec son fils, sa belle-fille et sa petite-fille à Toronto depuis deux ans. D’origine chinoise, il a passé toute sa vie à Singapour.

A Singapour, il y a deux communautés, celle qui avait reçu une éducation anglophone et celle qui allait dans les écoles chinoises traditionnelles. Chang a reçu une éducation chinoise, son fils et sa petite-fille ont quant à eux reçu une éducation anglaise. Il constate donc le fossé entre lui et sa petite-fille qui se considère comme une anglaise. Chang a le mal du pays, le manque de son identité chinoise. Alors, il se rend à Chinatown, là-bas il est heureux…

Ce texte évoque l’expatriation qu’on n’a pas choisie, l’expatriation qui provoque le vague à l’âme. Une nouvelle très intéressante.

Franchir les distances par Tan Mei Ching

Un retour au pays qui nous a vus naître le temps d’un voyage. Passer du Singapour à la Chine, comparer les habitudes de vie.

Amarjit a le whisky amer par Kirpal Singh

Le narrateur évoque un fait passé il y a 7 ans. Il vient tout juste d’arriver à New York en provenance de Singapour pour passer un entretien d’embauche à l’université Columbia et est en compagnie un soir d’autres amis dont Amarjit, ingénieur fraîchement diplômé, ayant quitté l’Indiana pour New York dans l’espoir d’y trouver de meilleures perspectives d’avenir. Le frère d’Amarjit, en provenance de Singapour, est arrivé à New York dans l’espoir de persuader son frère de retourner à Singapour.

Le rêve américain et les difficultés pour le vivre sont évoquées. L’immigration, les conditions de travail parfois non valorisantes en tant qu’étranger sont également évoquées. Si certains veulent persévérer quelque soit les embûches, d’autres préfèrent retourner à une vie moins frustrante que celle vécue aux USA.

J’aurais voulu que le narrateur évoque ce que ses amis et lui sont devenus. Histoire de voir si ceux qui ont voulu persévérer dans le rêve américain ont eu gain de cause. 🙂

Les 3 autres nouvelles du recueil Vidéo par Alfian bin Sa’at, L’élève Lee Geok Chan par Catherine Lim et L’expatrié par Lim Thean Soo m’ont laissée indifférente tant au niveau du style que de l’intrigue. Il m’est même impossible de vous faire un résumé de ces nouvelles.

Je pense qu’il est temps pour moi de faire une longue pause avec cette collection Miniatures où mes lectures les plus intéressantes jusqu’ici sont Nouvelles du Soudan et Nouvelles de Taiwan.

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Nouvelles du monde #12 : Israël

Je continue mon tour du monde littéraire grâce à Youscribe. Aujourd’hui, halte en Israël. Une nation à laquelle je suis spirituellement attachée.

Une petite fille apprend à nager avec grand-mère Reisel, dans le périmètre réservé aux croyances orthodoxes. Plus loin, Félix Silvane agent d’assurances, émerge d’un coma profond et réalise qu’il n’a jamais contracté d’assurance pour lui-même. Dans une maison de retraite, une vieille femme serre un oignon dans sa main pour le repas du shabbat alors qu’elle regarde ses enfants s’éloigner… Enfin, dans la bande de Gaza, Jacob Benhamoun, l’Israëlien, et Hani Elajrani, le Palestinien, shootent dans des canettes vides, à la lisière de la Terre promise…
Un recueil de nouvelles de la « jeune littérature » israélienne et palestinienne qui ne portent plus le même regard sur l’édification de la nation, de l’intégration des nouveaux émigrants ou des inquiétudes pour l’avenir du pays, mais s’interrogent sur le monde d’aujourd’hui, là où les réminiscences coulent à flots comme autant de pétales de roses…

Petite rose en méditerranée de Nava Semel

Une grand-mère apprend à sa petite-fille à nager dans le périmètre réservé aux croyantes orthodoxes. J’ai découvert grâce à cette nouvelle les rites liés au mariage juif. Par ailleurs, j’ai beaucoup apprécié la sagesse des phrases de la grand-mère.

L’honneur du Tout-Puissant, décréta grand-mère, exige que nous gardions une certaine pudeur, même à l’abri des regards.

Un mauvais karma d’Etgar Keret

Félix Sivane, agent d’assurances qui savait si bien convaincre n’a contracté aucune assurance pour lui-même. Alors quand un accident survient, il comprend que son histoire personnelle est plus efficace que toutes les autres.

De prime abord, on peut penser que l’histoire s’arrête là mais elle débouche sur la vie qu’on perçoit lorsqu’on est dans le coma, un endroit sans peur, où même la douleur, quand elle se produisait, ne faisait pas mal mais s’ajoutait aux autres sensations qu’on était heureux d’éprouver. Ca m’a fait drôle de lire cette phrase parce qu’un proche qui a été dans le coma, m’a dit à peu près la même chose de cet état.

Mes années de jachère d’Orly Castel-Bloom

Une femme qui imagine ce que sera sa vie quand elle sera vieille. Elle envisage de se libérer de la contrainte du comportement.

La dernière bougie de Mohammed Aldirawi

Jacob Benhanoun, juif vivant à Lyon, retourne sur la terre promise de ses ancêtres avec sa famille. Là, il devra faire son service militaire. Posté à la bande de gaza, il fera la connaissance d’Hani Alajrani, jeune homme palestinien, membre d’un groupe de résistants.

Ils avaient beau bondir comme de braves soldats face aux discours d’Ismael, ils étaient jusqu’ici, pour moi, les petits copains de classe qui imitaient le chant du coq quand le prof tournait le dos.

Sept histoires brèves d’Alex Epstein

Sept histoires qui tiennent sur quelques lignes. Sept histoires aux personnages étranges et drôles à la fois.

  • Le cauchemar des montres de Jung où le psychanalyste Carl Jung a peur que sa femme demande à sa maîtresse si elle a l’heure.
  • Sms en errance : des déclarations d’amour qui restent sans réponse.
  • Celle qui collectionnait les grilles de mots croisés remplies: Anna collectionne des grilles de mots croisés remplies. On apprend aussi que le bégaiement d’Anna a disparu dès qu’elle eut appris l’hébreu.
  • L’ange dont rêvèrent Brod et Kafka : L’un rêve d’un ange qui n’a plus que l’aile droite et qui se renseigne sur Kafka. L’autre rêve d’un ange sans ailes qui se renseigne sur Brod.
  • Celle qui rêvait de chansons imaginaires : Avez-vous déjà entendu parler de la chanson qui commence ainsi : « l’amour est un nouveau visa sur le passeport d’un mort » ?
  • De l’autre côté du mur: Un mur construit pour se séparer du fou. Mais que devient ce fou ?
  • De la concordance des temps entre la poésie et la prose : une rencontre entre un écrivain et un poète qui dure deux minutes et qui m’a arraché un sourire.

J’ai apprécié aller à la découverte de plumes israéliennes et palestinienne mais Nouvelles d’Israël ne fera sûrement pas partie des livres que je recommanderai pour qui veut découvrir la collection Miniatures. Je n’ai pas été emportée par les récits. Il n’y a que la nouvelle d’Etgar Keret qui se démarque du lot selon moi.

Je ne désespère pas. Je continue ma découverte de la collection en espérant que la prochaine halte soit une excellente lecture. J’ai le choix entre la Malaisie et Singapour pour mon prochain voyage littéraire. Lequel d’entre les deux, choisiriez-vous pour moi ?

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Nouvelles du monde #11 : Pérou

Couverture Nouvelles du Pérou

L’Eldorado ou le pays de l’or a longtemps fait rêver les Européens. Peut-être le plus secret, en tout cas l’un des plus méconnus des pays d’Amérique du Sud, le Pérou actuel fut l’épicentre de la fascinante civilisation inca qui, du xiie au xvie siècle, se déploya dans la cordillère des Andes, avant d’être annexé par les conquistadors espagnols. Les six cuentos (nouvelles) de ce volume, tous traduits de l’espagnol, reflètent subtilement les singularités de ce monde andin. Dans ce pays de sangs mêlés, la grande majorité de la population des campagnes andine et amazonienne, des montagnes, de villes comme Cusco, est très nettement amérindienne. Par ailleurs, ce pays est marqué par la conscience intrinsèque d’un « avant » et d’un « après » la colonisation, conscience qui a inévitablement modelé une identité, complexe, pleine de contradictions, laquelle résulte du mélange de philosophies et de valeurs opposées. Le Pérou d’aujourd’hui – urbain, rural – est dans chacune des nouvelles de ce volume.

De la glace pour les martiens de Claudia Ulloa Donoso

Une mère s’apprête à recevoir sa fille et le fiancé de celle-ci qui est norvégien. La mère découvre via Internet le pays de son futur gendre. Elle est chagrinée par les différences de développement entre la Norvège et le Pérou. Une nouvelle qui m’a au moins permis de découvrir les mets péruviens.

Les rois de la forêt de Karina Pacheco Medrano

Une femme est la seule touriste dans un hôtel. Là elle revit son passé : son engagement pour la 1ère fois dans la selva profonde, ses voyages dans les lagunes amazoniennes vingt ans plus tôt, ses réunions avec les autochtones qui vivaient sur les terrains pétrolifères, les dénonciations des communautés relatives aux fuites et dérèglements causés par les entreprises pétrolifères et ce terrible jour où elle a dû être évacuée. Je ne suis pas sûre d’avoir saisi la chute du récit.

Ici-là-bas de Grecia Caceres

Un jeune homme qui tombe sous le charme d’une femme plus âgée que lui. Une histoire qui le hante. Une histoire captivante mais je suis restée sur ma faim.

De courageux garçons de Félix Terrones

Un groupe de garçons rêvent de pouvoir être écrivains à Paris mais ce rêve c’est leur ami Antonio qui va le vivre. Quand il revient des années plus tard, ils lui réservent un accueil triomphant mais l’Antonio Carneiro qu’ils avaient côtoyée durant leur jeunesse n’existe plus. Que lui est-il donc arrivé à Paris ?

On était nombreux à vouloir être écrivains, mais seule une poignée d’élus peuvent l’être vraiment, une race exceptionnelle à laquelle Antonio appartenait depuis toujours.

Une sympathique lecture même si elle me laisse avec une énigme non résolue sur la vie d’Antonio à Paris.

Les climats étranges de Carlos Yushimito

Le narrateur a 50 ans et il vit avec une jeune fille de 30 ans sa cadette et qui s’imagine être une autre personne ou en dehors de lui. Un récit bien étrange pour moi.

L’art ancien de la fauconnerie de Paul Baudry

De quoi ont pu mourir les pigeons dans la volière de l’Apra (l’Alliance Populaire Révolutionnaire Américaine) ? Sandro Sandoval, expert du ministère de la Santé préfère se concentrer sur la recherche des causes plutôt que sur les mauvais souvenirs de l’incident avec le faucon et son père qui accordait plus de temps à son ami, Víctor Raúl Haya de la Torre (fondateur de l’APRA) qu’à son fils. Une amitié ensorcelante, prioritaire qui a l’allure d’un sentiment amoureux.

Il n’y a pas que Don Gaetano Sandoval qui vouait une admiration exclusive au fondateur de l’Apra. Il y a également Roberto Amaya, vigile de la maison du peuple qui veille jalousement sur la mémoire du fondateur et semble-t-il sur ses dernières volontés. Une seule phrase m’est venue à l’esprit à la lecture du dernier paragraphe: tout excès nuit, la loyauté n’est pas une exception.

Dans le cœur d’un homme d’Etat, il n’y a jamais de place pour deux amours.

De ce recueil de nouvelles, j’en ressors avec une appréciation mitigée. J’ai découvert un peu Lima, l’histoire politique du pays, la selva mais je ressens pour 80% des nouvelles un sentiment d’inachevé. J’aurais voulu des histoires plus percutantes.

Grand merci à Youscribe qui m’a permis de lire ce recueil de nouvelles gratuitement sur sa plateforme. J’aurais été bien embêtée si je l’avais acheté.

J’ai six autres recueils de cette collection à découvrir via Youscribe. J’espère avoir des lectures aussi plaisantes que celles de Nouvelles du Soudan et de Taïwan.

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Nouvelles du monde #10 : Suisse

Couverture Nouvelles de Suisse

Pour certains, la Suisse est un trait d’union entre l’Europe du Nord et l’Europe du Sud, une sorte de balcon sur l’Italie et sur le monde méditerranéen. Pour d’autres, elle est la partie la plus à l’ouest de l’épine dorsale de la Mitteleuropa, s’inscrivant dans une succession de montagnes et de vallées séparées par le Danube, de la chaîne des Alpes à celle des Carpates, de Genève à Odessa. Derrière la carte postale, la Suisse est ce pays étonnant au centre de l’Europe, mais pas dans l’Union européenne. Comment devient-on écrivain dans un pays si singulier ? Comment écrit-on aujourd’hui au pays de Nicolas Bouvier, Ella Maillart, Robert Walser, Friedrich Durrenmatt, Charles-Ferdinand Ramuz, Albert Cohen ?

Dans les six nouvelles présentées ici, la question de l’identité suisse est omniprésente, elle court en filigrane. Un regard clinique, parfois sans concession, est posé. Avec humour, avec détachement. Société à la fois ultramoderne et traditionnelle, méconnue et exotique, la Suisse vaut un voyage littéraire.

Six nouvelles écrites à 67% par des femmes. Commençons par la nouvelle que j’ai le plus appréciée

Mon drôle de voisinMax Lobe

Un homme et ses amis descendent dans les rues de Genève pour dire haut et fort leur indignation et leur volonté d’accueillir ces gens, des familles entières, des hommes, femmes et gosses que les bombes et autres armes chimiques avaient chassés.

Nous sommes suisses, ou du moins nous y résidons. Et c’est bien connu, la Suisse est neutre. Elle n’a jamais fait de mal à personne. Bien au contraire, elle a toujours été une terre d’accueil.

Mais cet homme est-il réellement prêt à accueillir quelques migrants chez lui ? Cette nouvelle bien trop courte pour moi révèle l’ambivalence de l’accueil des migrants.

Ce que je veux, c’est avoir le choix. Je n’ai pourtant pas changé d’avis. Non, tant s’en faut. C’est vrai, je veux recevoir des migrants, moi. Oui, oui. Mais… Non. Pas question. Je veux choisir qui recevoir.

J’ai un avis plutôt mitigé pour les cinq autres nouvelles. Elles sont bien écrites mais…

Une heure et dix minutes d’Aude Seigne

La narratrice parle à une écrivaine qui vit à Genève et est en résidence d’écriture. Elle évoque l’image de Genève perçue par les autres (banques, assurances, boutiques de luxe, fric, fric, fric, ONG) et ce qu’elle perçoit en tant qu’habitante à Genève. Dans cette résidence, il y a d’autres écrivains et cette résidence devient un partage d’expériences sur les pays d’origine. Le coût de la vie en Suisse est notamment évoqué. Je suis restée sur ma faim avec cette nouvelle car elle est plus axée sur les interrogations d’écrivains que sur la découverte de la Suisse.

Hommage au Berbère de l’Arctique de Pascale Kramer

La nouvelle prend place en Russie. On découvre l’histoire d’un berbère tunisien à Salekhard. Quelles sont les motivations qui décident d’un enracinement dans un ailleurs lointain et perdu ?

Réflexion intéressante mais ce que je voulais c’était un voyage en Suisse, pas en Russie.

Un jeune homme qui part… de Noëlle Revaz

Des conseils adressés à un jeune homme qui part étudier dans un autre canton. Je m’attendais à des conseils qui montreraient par exemple les différences de culture ou d’habitude entre les cantons suisses mais ces conseils prodigués auraient très bien pu être adressés à un étudiant ivoirien qui part à Nantes.

Demande d’emploi de Matthias Zschokke

Un jour, un jeune homme originaire de Suisse sonne à la porte de l’appartement du narrateur et lui parle de son beau pays et de sa détresse. Il ne peut savourer son oisiveté alors qu’il devine autour de lui des regards méfiants et envieux. Idem pour les habitants de son pays

Une nouvelle qui avait bien commencé mais dont je n’ai pas saisi la chute.

Une Suisse intérieure de Ghislaine Dunant

La narratrice se retrouve par hasard dans une résidence d’écrivains en Suisse, près de Lausanne. J’ai eu l’impression de lire une autre version de la nouvelle d’Aude Seigne avec en plus les souvenirs d’enfance de la narratrice.

Ce recueil se lit très vite, il s’étale sur 115 pages. J’ai découvert des auteurs suisses mais pas assez la Suisse. A travers cette collection, je recherche un voyage au cœur du pays mais avec Nouvelles de Suisse, j’ai survolé le pays. Dommage.

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Robert et les Catapila de Venance Konan

« Sans pitié pour le monde, ce livre dit la cruauté de la vie, le dérisoire de l’existence, sa face burlesque et sa face triviale. Mais il dit aussi les derniers plaisirs qui restent, après ceux de l’art et de l’amour : le rire et la parole. Il dit encore le poids souvent étouffant des préjugés traditionnels et les tromperies de la modernité. Les hommes y sont ballottés par les événements, rêvant d’un ailleurs paradisiaque et perdus dans un présent où les repères s’effacent en se mélangeant sans cesse. »

J’ai emprunté ce livre lors de l’avant-dernier Livr’échange et je remercie celui qui me l’a prêté parce que ça a été une belle découverte pour moi.

Ce livre comporte six longues nouvelles d’environ une trentaine de pages chacune. Pour moi, on dépasse le cadre de la nouvelle, en tant que genre littéraire car les nouvelles n’ont pas vraiment de chute brutale. On est vraiment dans le sens 1er du mot nouvelles : Renseignements d’ordre privé donnés sur quelqu’un, sur une famille que l’on connaît.

Les narrateurs nous livrent leur intimité ou celles des autres. Ils nous font découvrir Robert et les catapila, Maryse, les gens du parti de l’opposition, un imam, le vieil oncle Kouadio, etc…

Ces six nouvelles ont un point commun: le rire. Des situations cocasses les traversent pour le plus grand plaisir du lecteur.

L’histoire la plus drôle ? J’hésite entre deux. Commençons par la chatte de Maryse. Dans cette nouvelle, un étudiant ivoirien rencontre sur le campus une journaliste blanche. Pour lui, c’est le jackpot, entretenir une relation d’amour avec cette femme sera sa porte d’entrée en Europe. Mais avant, il lui faudra supporter la présence et les caprices de la chatte de Maryse. J’ai ri pour l’ambiance très estudiantine, les situations cocasses vécues par le narrateur. Les passionnés et défenseurs d’animaux seront choqués en lisant la nouvelle mais dans ma contrée, nous avons majoritairement un rapport très particulier avec les chats. 😀

Enchaînons avec L’enterrement de mon oncle . Le narrateur, un étudiant en anglais, revient au village pour enterrer son oncle Kouadio. Un oncle qui était habité par la colère, bagarreur et qui a lui seul pourrait écrire mille et un récits avec sa vie. Les quelques histoires de sa vie racontées sont drôles et pour une fois, on se dit : tiens, j’aurais bien aimé assister à cet enterrement là.

Ces nouvelles ne font pas que rire. Elles donnent à réfléchir sur des sujets d’actualité en Côte d’Ivoire notamment les conflits fonciers ruraux opposant les autochtones aux étrangers.

Dans la nouvelle qui donne son titre au recueil, Robert et les Catapila, Robert est un homme assez oisif qui va offrir à un étranger et son frère des parcelles de terre en échange d’argent ou de boissons. Plus tard, quand ces étrangers commenceront à prospérer, la jalousie et la méfiance vont entraîner des conflits.

Mais à qui appartient la terre ? Au propriétaire, à celui qui la met en valeur, à l’Etat ou n’appartient-elle à personne ?

Dans le millionnaire, nous sont posées, à travers l’histoire de cet imam dont le fils a gagné à un jeu de hasard, ces questions : jusqu’où êtes-vous prêts à transiger ? Quelle est la limite de votre morale, vos principes religieux ? Un casuiste sommeille-t-il en chacun de nous ?

Terminons avec les deux nouvelles qui malgré les quelques scènes drôles qu’elles comportent ne m’ont pas réellement emportée : Au nom du parti et la guerre des religions.

Dans Au nom du parti, il est demandé, lors d’un congrès du parti, à un militant actif du parti de passer une nuit avec une autre camarade afin que celle-ci trouve l’inspiration nécessaire pour écrire une motion. Le récit évoque les multiples dérives politiques.

Dans la guerre des religions, sont évoquées ces nouvelles églises évangéliques qui participent plus à la nuisance qu’à l’édification spirituelle du peuple, des préjugés qu’on entretient sur autrui, etc…

En consultant mes stats de lecture, je me rends compte que je lis pas mal de recueil de nouvelles. Et vous, appréciez-vous ce genre ?

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TTL 77 : Alléluia pour une femme-jardin de René Depestre

Qui dit jeudi, dit Throwback Thursday Livresque.
TTL grâce minlibé
Cette semaine, le thème est D comme…
Depestre, un auteur haïtien, découvert grâce aux cours au collège de France de Yanick Lahens.
René Depestre - Babelio
De cet auteur, j’ai déjà lu Eros dans un train chinois. Aujourd’hui, c’est un autre de ses recueils de nouvelles érotiques que je vous présente.
Couverture Alléluia pour une femme-jardin
La tante Zaza, à la beauté légendaire, emmène son jeune neveu en vacances à la campagne. Il a seize ans et, ingénument, elle lui fait partager son lit. L’inévitable se produit. Zaza, plus tard, périra dans un incendie, mais son souvenir adorable restera vivant.
Un autre adolescent, pendant un autre été, entre en rivalité amoureuse avec un religieux irlandais, à cause d’une servante appétissante.
Un juge concupiscent, qui épie une belle fille au bain, en perdra son poste.
Un vieux Noir à l’agonie est sauvé par une jeunesse mais se retrouve métamorphosé en Blanc.
Un étudiant refait la carte du monde en proportionnant l’importance des pays à la beauté de leurs femmes. Un voyageur, interné à Cuba par les services d’immigration, a une aventure amoureuse dans les prisons de Batista.
Un médecin confond les soins donnés à ses patientes avec le plaisir partagé avec elles…

Entre Jacmel, Paris, Nashville et Cuba, la sensualité, le désir, le plaisir de la chair assumé déploient leurs ailes.

Dans ces dix nouvelles, les personnages transgressent les interdits comme l’inceste, le vœu de célibat. Ils n’ont qu’un seul maître et seigneur : la chair et ses désirs.

Depestre célèbre la femme créole, mulâtre : belle, sensuelle et libre. La culture vaudou est également présente dans la majorité des nouvelles. La misère du pays est décrite ainsi que le racisme aux USA. Sympathique moment de lecture dans l’ensemble, j’ai particulièrement apprécié 5 nouvelles pour leur thème, leur chute et l’humour. 

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Publié dans Arrêt sur une oeuvre

TTL 74: Nouvelles du monde #8: Turquie

Qui dit jeudi, dit Throwback Thursday Livresque. Cette semaine, le thème est N comme…

Couverture Nouvelles de Turquie

Istanbul faisait partie des villes que je rêvais de visiter quand j’étais enfant. Et puis grâce à Novelas, j’ai découvert les soap opera turcs et d’autres villes magnifiques de la Turquie comme Izmir.

De quoi ou de qui est-il question dans ce recueil de cinq nouvelles ?

  • Un derviche, réveillé d’un long sommeil par un supérieur religieux chaussé de mules en poil de lapin, qui part pour une mystérieuse mission. Moi qui suis nulle en histoire, j’étais complètement perdue. Le repère spacio-temporel n’ayant pas été donné, j’étais un peu perdue. Le derviche fait allusion à l’arrivée des turcs d’anatolie et des sultans donc on pourrait situer l’histoire au Xe siècle.
  • Un narrateur érudit et amoureux, accompagné d’un jeune drogué titubant, qui s’en va voir les derviches d’Emir Sultan.
  • Partir à tout prix, fuir pour vivre et revenir, comme une porte qui s’ouvre mais jamais ne se referme. Une nouvelle narrée à la 2e personne du singulier. Je suis définitivement amoureuse de ce type de narration.
  • Interviewer un écrivain pour explorer la boîte magique de ses histoires.
  • Une femme de ménage, lunatique et culottée, qui rêve de jouer la comédie sur les planches qu’elle astique tout en réécrivant Shakespeare.

Je voulais un voyage des sens à travers ce recueil de nouvelles. Voir la Turquie, la goûter, la sentir, l’écouter, la toucher. Cela n’a malheureusement pas été le cas. A part les derviches mentionnés, la culture turque n’est pas suffisamment décrite, célébrée. Les nouvelles sont bien écrites mais il m’a manqué de l’éblouissement.

Quel livre auriez-vous proposé pour ce thème ?